Friday, June 23, 2017

Citation du 24 juin 2017

if a clod be washed away by the sea, Europe  / is the less, as well as if a promontory were, as  / well as any manner of thy friends or of thine  / own were ; (…)

Traduction : Si la mer emporte une motte de terre, l’Europe en est amoindrie, comme si les flots avaient emporté un promontoire, le manoir de tes amis ou le tien

John Donne (1624) – Méditation XVII (1)
Commentaire II
Je prendrai trois vues successives sur ce court poème, dont chacun connaît la fin grâce au livre d’Hemingway, mais qui porte bien d’autres éléments auxquels nous réagissons spécialement. Voici donc la seconde :
John Donne est-il toujours lu en Grande-Bretagne ? On peut en douter au vu des actualités qui agitent la chronique. Après la crise des migrants (cf. Post d’hier), dont les Anglais persistent à refuser de croire qu’étant Erythréens, Syriens ou Pakistanais, ils sont néanmoins des hommes comme tous les autres – voici le Brexit.
- Ne croyez pas, dit John Donne, que l’Europe sans la Grande-Bretagne ce soit toujours la même Europe (rappelons que nous sommes en 1624). Si petit que soit ce territoire, il a autant d’importance que le manoir ou la propriété la plus importante qu’on puisse concevoir – et quand bien même il ne serait qu’une motte de terre désagrégée par la mer, sa perte serait sans remède. Les dimensions importent peu, il n’y a pas de petites pertes, elles s’équivalent toutes, solidaires qu’elles sont du même tout.
Brexit : On admettra facilement que cet avertissement vaille pour les anglais bien qu’il semble adressé aux européens : la réversibilité est la règle, puisqu’eux et nous sommes à égalité. De plus, il n’y a pas de jeu gagnant/perdant et encore moins gagnant/gagnant : il n’y a que du perdant/perdant. Oui, amis british, vos poètes vous en avertissent : si vous commencez à couper les ponts avec le continent, vous allez vers l’oubli de votre nature réelle, et à considérer que votre île soit incommensurable au monde qui l’entoure, vous allez vous persuader  que la perte de celui-ci est une petite chose, comparée à ce que vous êtes.
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(1) Poème à lire ici – Traduction :

« Aucun homme n’est une île, un tout, complet en soi ; tout homme est un fragment du continent, une partie de l’ensemble ; si la mer emporte une motte de terre, l’Europe en est amoindrie, comme si les flots avaient emporté un promontoire, le manoir de tes amis ou le tien ; la mort de tout homme me diminue, parce que j’appartiens au genre humain ; aussi n’envoie jamais demander pour qui sonne le glas : c’est pour toi qu’il sonne. » John Donne

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