Thursday, April 30, 2015

Citation du 1er mai 2015

Bonne fête du travail ! 

Belle journée à ne rien faire d’autre que défiler dans les rues.
Profitons-en  pour nous préparer au choc qui nous attend …en 2017
- Quand les ménagères seront retournées à leurs fourneaux, qui viendra prendre leur place sur le marché de l’emploi ? Les enfants !
- Le 1er mai, manifestez dans les rues en demandant bien fort que l’apprentissage soit rétabli partout dès l’âge de 8 ans ! Et qu’il soit obligatoire !
Travail – Honneur – Famille – Travail.




Ceux qui voudraient résister iront (re)lire ce chapitre du Capital où Marx expose ce que c’est que le travail des enfants… en Angleterre au 19ème siècle, et sans doute encore aujourd’hui au Bengladesh et ailleurs.

Wednesday, April 29, 2015

Citation du 30 avril 2015

.. je suis peu à peu arrivé à mettre en doute, non seulement la causalité psychanalytique de l'image, mais encore toute causalité psychologique de l'image poétique.
Bachelard – La Poétique de l'espace, 1957, p. 156.
Si vous voulez mettre dans l’embarras un interlocuteur qui fait son savant dès que vous parlez de littérature, posez-lui cette question :
- Dis-moi, mon cher, qu’est-ce que c’est selon toi que la poésie ?
C’est méchant, n’est-ce pas ? On en a zigouillé pour moins que ça – demandez à Socrate !

Je pose un principe qu’on aura du mal à contester : lorsqu’on doit fournir une définition un peu difficile, le plus simple est de dire non ce qu’est la chose, mais ce qu’elle n’est pas. Comme ce procédé a été employé systématiquement pour la définition de Dieu, on appelle cela une « théologie négative ».
Ainsi de la poésie définie non comme un procédé issu de mécanismes analysables, mais comme un pur jaillissement créatif, quelque chose qu’on reconnaît à ce que rien ne peut en être une cause explicative. L’image poétique n’est donc pas un symbole, quelque chose qui ne se comprendrait qu’à condition de connaître un système de correspondance au sein du quel il prendrait une signification ; elle ne dépend pas non plus de l’état psychologique du poète – pas seulement en tout cas.
La tradition millénaire a déjà fait état de cette particularité de la poésie : le poète doit avoir le concours de sa Muse pour produire ses poèmes. Pas de poésie sans inspiration, puisque, comme on vient de le dire, pas de création qui dépende seulement de causes connues et mécaniquement utilisables.
- Nous voilà donc tiré d’affaire : allons chercher dans la liste des Muses celle qui serait en charge de l’inspiration poétique. Mais là : catastrophe ! Il n’y a pas une muse qui réponde à cette définition, il y en a au moins trois: Terpsichore (pour la poésie lyrique) et Calliope (poésie épique – la Muse à la belle voix) – sans oublier Thalie et la poésie pastorale… Certains spécialistes n’hésitent pas à dire que les 9 Muses sont toutes des muses de la poésie, parce que la poésie ne signifie rien d’autre que la création artistique.
Nous voilà bien embarrassés, n’est-ce pas ? Sauf que maintenant nous savons pourquoi il est difficile de fournir une définition de la poésie. C’est que la poésie ou bien est un concept trop large pour être défini (« Création » dont on ne peut donner l’origine dans l’esprit humain) ; ou bien il s’agit d’une production littéraire dont le contenu suppose une définition spécifique – qui donc exclu toutes les autres.
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(1) « C'est Platon (dans Ion) vers 401 av. J.-C., puis les néo-platoniciens, qui font des neuf Muses les médiatrices entre le dieu et le poète ou tout créateur intellectuel. » Wiki, Art. Muses

Tuesday, April 28, 2015

Citation du 29 avril 2015

Jamais rien n'arrive sans qu'il y ait une cause ou du moins une raison déterminante, c'est-à-dire qui puisse servir à rendre raison a priori pourquoi cela est existant plutôt que non existant et pourquoi cela est ainsi plutôt que de toute autre façon.
Leibniz – Théodicée, I, 44
Allez ! Un peu de philo-philo, pour changer.
Aujourd’hui, le Principe de raison suffisante, tel qu’énoncé ci-dessus par Leibniz et analysé ci-dessous par Schopenhauer (les exemples pour montrer que ce principe fonctionne aussi dans la vie quotidienne).
Schopenhauer écrit en 1813 De la quadruple racine du principe de raison suffisante :

1. Principe de raison suffisante du devenir. Tout état nouveau par lequel passe un objet a été nécessairement précédé par un autre état qui se nomme cause, alors que l'autre se nomme effet. C'est la loi de causalité.
Exemple : Comment vous m’avez fait, Maman-Papa ? Et avec quoi ?
2. Principe de raison suffisante de l'être. Chaque être réel est déterminé par un autre être.
Exemple : Dis, Maman, c’est bien avec Papa que tu m’as fabriqué ?
3. Principe de raison suffisante de l'agir. La volonté agit quand elle est immédiatement ou médiatement sollicitée par une sensation. Il s'agit de la loi de motivation, qui est une causalité vue de l'intérieur.
Exemple : Maman-Papa, qu’est-ce qui vous a donné envie d’avoir ce joli petit enfant que je suis ?
4. Principe de raison suffisante du connaître.
Exemple : Hein que vous avez voulu que je naisse ? Montrez-moi comment votre amour m’appelle chaque jour encore à l’existence.


… Aïe ! Il y a des racines qui sont plus difficiles les autres à dégager.

Monday, April 27, 2015

Citation du 28 avril 2015

Moi j'ai les mains sales. Jusqu'aux coudes. Je les ai plongées dans la merde et dans le sang. Et puis après ? Est-ce que tu t'imagines qu'on peut gouverner innocemment ?
Sartre – Les mains sales
A la suite d’un Post récent où nous tentions de cerner quelques unes des  signification de l’innocence, nous allons essayer aujourd’hui de comprendre ce que veut dire Sartre quand son héros s’exclame : « Est-ce que tu t'imagines qu'on peut gouverner innocemment ? »
1 – Au sens propre, l’innocence est l’état de celui qui ne commet pas le mal. De ce point de vue, notre citation signifierait que pour gouverner il ne faut pas hésiter à trahir, voler, violer (au moins ses engagements). On ne pourrait donc gouverner en étant honnête, et les braves gens auraient donc mille fois raison de dire : « Les politiques ? Tous pourris ! ».
2 – Au sens dérivé, l’innocence désigne une certaine naïveté, dont on devrait se défaire en abordant une carrière politique : on cesse alors d’être innocent – ou plutôt, on ne peut plus être un innocent. La lucidité qui apparaît révèle que le sens de l’action politique réside par nature dans la duplicité. Gouverner consiste alors à réaliser l’acte pour le quel on a été élu, mais en assurant en même temps sa réélection. Pas de décision sans arrière pensée, pas de discours qui ne vise un double effet.

On le vérifie tous les jours quand, acculé par la crise économique qui frappe la France – et par la commission de Bruxelles – le gouvernement prend des mesures dont on dit qu’elles sont courageuses. « Courageuses » : qu’est-ce à dire ? Simplement ceci : que celui qui les prend risque de ne pas être réélu, ce qui se traduit par l’affirmation que, plus on s’approche de la date de la prochaine élection, moins on décidera de nouvelles réformes.

Les réformes « courageuses » sont des réformes « simples », entendez qu’elles n’ont qu’un sens, celui qui s’affirme dans la déclaration d’intention. Gouverner c’est alors faire ce qu’on dit et dire ce qu’on fait. Hélas ! Voici une formule bien creuse et qui fait rire tout le monde. Preuve que nous aussi avons perdu notre innocence.

Sunday, April 26, 2015

Citation du 27 avril 2015

Tu parles trop, j'entends du soir au matin / Les mêmes mots, toujours les mêmes refrains / Tu fais:" Bla bla bla bla " / C'est ton défaut
Tu parles trop : paroles de Richard Antony, chanté par Eddy Mitchell (Les chaussettes noires)

In Memoriam.
Hélas ! Richard Antony est mort… Pleurons l’idole yé-yé mais aussi souvenons-nous qu’à l’époque nous tenions ces jeunes gens pour ridicules.
Ainsi, Richard Antony a écrit les paroles de cette chanson, mais le meilleur de son texte est dans les onomatopées : « Tu fais:" Bla bla bla bla " » dit le chanteur, mais c’est pour s’exclamer juste après : « Rien n'est plus beau, tu peux parler nuit et jour / Oui, oui, ha-a-a-a! » Enfin, quand on est yé-yé, on peut se permettre ça.

Tu parles trop… Mais au fait : comment sait-on qu’on « parle trop » ?
Celui qui parle trop est  quelqu’un qui parle de façon incoercible : « Bla-bla-bla ». Ce défaut  est encore pire quand on ne sait pas quoi dire, car voici des gens qui bavardent sans trop se soucier de dire quelque chose : comme lorsqu’on est en voiture et qu’on veut passer le temps dans les embouteillage. Ce qu’a très bien compris le créateur du site de co-voiturage Blablacar (1).

Maintenant lisons le texte de cette chanson avec un peu d’attention. La petite nana de la chanson qui parle trop ne se contente pas de remuer de l’air de ses jolies  lèvres sans rien dire de significatif – flatus vocis – bien au contraire hélas ! Elle dit aussi certaines choses qu’elle ferait mieux de taire. On lui reproche ainsi de « dire bien fort ce que les gens pensent tout bas », et aussi de révéler ce qu’on voudrait cacher : « avec toi mon percepteur / De mon magot, connaît le chiffre par cœur ». On reconnaît la misogynie classique qui reproche aux femmes d’être des écervelées. Mais en réalité, ce reproche concerne quiconque parle trop : car forcément à un moment où à un autre viendra au grand jour ce qu’on aurait du cacher. La parole se soule d’elle-même.

Oui, nous arrivons presque sans y penser à répondre à la question « Comment sait-on qu’on parle trop ? ». C’est quand un mot en entrainant un autre c’est notre discours qui nous gouverne et non l’inverse
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(1) « Pourquoi BlaBlaCar sur mobile et en Europe ? Parce que nous sommes très souvent bavards en voiture lorsqu'on se rencontre ! » (Lu ici)