Thursday, August 21, 2014

Citation du 22 août 2014



Savoir écouter est un art.
Epictète
Sagesse d’Epictète III
Allez ! Encore un petit tour chez Epictète, c’est moi qui vous l’offre.

Que signifie le mot « écouter » si l’on admet que ce soit un art ?
Au sens moderne du mot, l’art implique un talent particulier, voire un génie. Difficile à croire.
Admettons plutôt que l’art désigne, comme à l’époque d’Epictète, un savoir-faire, ou une science appliquée. Bref, quelque chose qui n’est pas spontané, mais qui peut s’apprendre, qui suppose un effort et de l’attention.
--> Concernant l'écoute, cela pose 3 questions : 1) que contient cet art 2) que requiert-il, 3) comment savoir si mon interlocuteur le possède ? (Autrement dit : est-ce que ça vaut le coup de lui parler ?)

1) En réalité, cet art est on ne peut plus facile à définir, même s’il est difficile à appliquer.
Car, celui qui vous écoute ne peut le faire qu’à condition de pouvoir intervenir dans votre propos, en sorte que sa pensée puisse se mêler à la vôtre, voire même se l’approprier comme lorsqu’on dialogue avec quelqu’un. Certes, ce dialogue peut-être virtuel, comme lorsqu’on lit un livre ; mais il est mieux qu’il soit réel, lorsque, justement, on écoute celui qui nous parle. On n’écoute qu’en pensant-avec (par exemple) le conférencier, en s’émouvant-avec (quelqu’un comme) le poète, en apprenant-avec le professeur, etc.
2) On voit bien que l’art d’écouter suppose un art symétrique du côté de la personne qui parle : c’est l’art de se faire écouter. Cet art ne suppose pas un acte d’autorité (comme trop de profs le croient), ni un art de séduire (qui anesthésie la pensée) ; il suppose un talent pour susciter la curiosité – mais attention, ce n’est qu’un premier moment. Il faut à partir de là entamer un dialogue avec celui qui écoute, de sorte qu’il soit mobilisé au point qu’il s’efforce de devancer si possible votre propos. On remarque parfois que les guides chargés de faire visiter un monument historique se mettent à interroger les touristes, un peu comme le ferait un instit : c’est irritant, mais il faut le comprendre. Si vous n’aviez que 30 minutes pour accrocher un auditoire et faire qu’il n’oublie pas tout ce que vous lui avez expliqué dans la minute qui suit : que feriez-vous ?
3) Malheureusement bien des gens font seulement semblant de vous écouter : moi qui ai été de longues années amené à parler devant des lycéens qui – pour certains – n’avaient qu’un espoir : entendre sonner la fin de la classe, je peux vous dire qu’il y a bien des stratégies pour faire croire qu’on écoute alors qu’on songe à bien d’autres choses.
Pour cela, l’un des moyen le plus simple, c’est de fournir des preuves qu’entre celui qui parle et celui qui écoute le canal et ouvert (1). Il y a des gens qui branlent du chef en signe d’approbation dès que votre regard croise le leur. Au téléphone, ce sont ceux qui ponctuent vos paroles de borborygmes : hump-hump-humpf…
On peut aussi faire semblant de prendre des notes, ou au contraire de lever pensivement les yeux au plafond.  
---------------------------------------
(1) Canal au sens du contact selon Jakobson : " le message requiert un contact, un canal physique et une connexion psychologique entre le destinateur et le destinataire, contact qui leur permet d'établir et de maintenir la communication." Voir ici.

No comments: