Sunday, July 06, 2014

Citation du 7 juillet 2014



Tout irait beaucoup mieux, si les gens prenaient l’habitude de dépenser leur argent, au lieu d’épargner.
Henry Miller – Crazy Cock
Connaissant Henry Miller, et indépendamment de l’invitation à la dépense que contient le titre de son livre (1), on devine qu’il cherche à renverser un précepte bourgeois que les artistes bohèmes devaient honnir : celui du bienfait de la retenue économique et de l’épargne.
On dira que l’épargne est autre chose que le refus d’une dépense, puisqu’il s’agit aussi d’investir. Et donc pour pouvoir investir il faut bien avoir d’abord épargné. Mais Henry Miller, souffle là-dessus un grand courant d’air frais : la santé, c’est la dépense sans souci de l’avenir et voilà tout.

Mais, n’est-ce pas cela qui est en cause aujourd’hui dans le conflit qui oppose les gouvernements européens au sujet de la politique économique de l’Union européenne ? Les uns – les Allemands – disant : arrêtez de dépenser, remboursez vos dettes et on verra après. Les autres disant : dépensez tout, vous ferez tourner la machine commerciale, ça va faire rentrer taxes et impôts et c’est ainsi que vous pourrez rembourser vos dettes.
Et d’ailleurs, vos débiteurs eux-mêmes devraient vouloir que vous retrouviez la santé économique car c’est comme ça – et comme ça seulement – qu’ils pourront espérer revoir un jour l’argent qu’ils vous ont prêté.
Mais, s’agit-il seulement d’un mécanisme économique ? C’est là qu’on touche à l’essentiel : Henry Miller le sait : c’est le désir qui fait marcher la machine humaine. C’est lui qui irrigue le corps humain, le corps social – et aussi le corps économique. Car l’économie repose sur la confiance en l’avenir, et l’avenir est d’abord ce que j’espère ou ce que je crains.
- L’épargnant est celui qui craint l’avenir : - Qui sait, dit-il, si demain je ne serai pas au chômage : épargnons. Ou alors : - Qui sait si je ne serai pas bientôt mort : plaçons cet argent sur un plan d’assurance vie ! Et pendant ce temps-là, s’accumulent dans les entrepôts les marchandises qu’on ne vend plus faute d’acquéreur solvables ; on licencie et on fait de nouveaux pauvres.
Allez ! Zigouillez votre livret-Ecureuil, et dansez toute la nuit.



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(1) Crazy cock : comment vous seriez tenté de traduire ça ? La Bite-folle ?

2 comments:

FRANKIE PAIN said...

drole de courage que de parlez de l'économie aujourd'hui et à partir de la phrase de henri miller.
c'est curieuse que je vous ai suivi et ma foi comme le caht couché sur le dos vous vous retomber très bien sur vos pattes bravos de la performances ; je vous embrasse cher jean pierre

Jean-Pierre Hamel said...

Je retombe « sur mes pattes », mieux que l’écureuil – du moins j’espère.
Occasion de revenir sur ce Post où j’ai un peu sollicité la citation, c’est vrai mais sans trahir l’esprit des œuvres de Miller.
Ce que j’ai voulu suggérer, c’est qu’il ne faut pas faire les dégoutés quant au le rôle du désir dans la vie sociale : ce n’est pas parce que les pubeux en font un usage immodéré qu’il faut l’oublier. C’est le désir qui fait tourner la machine et quand il s’éclipse il n’y a plus que déprime et suicide : non pas dans la vie des individus mais dans l’ambiance sociale. Et c’est comme ça que du coup on peut faire l’éloge de la dépense sous toutes ses formes.

Merci de me suivre chère Frankie.
Je vous embrasse
J-P