Tuesday, January 31, 2012

Citation du 1er février 2012

Il n'y a pas une vérité mais cent possibilités
Pablo Picasso – Cité à l’exposition Art modern & Pop culture de la Halle saint-Pierre (A lire dans le Post des Grisgris ici)

Picasso était féru de ces formules lapidaires et qui en imposent (1), mais qui devraient plutôt appeler le débat.
Déjà, il faudrait préciser un peu le sens de l’opposition qui est évoquée ici : on comprend en effet que Picasso veut dire que d’un côté on aurait une seule vérité qui serait nécessairement vraie – et qui n’existe pas ; et de l’autre cent possibilités entre lesquelles nous avons à choisir.
--> Mais parle-t-on de la même chose ? La vérité concerne la connaissance ; la possibilité affecte une forme d’existence potentielle ; comment les deux se raccordent-elles ?
Illustrons : supposons que nous parlions d’une hypothèse qui pourrait en effet concerner soit une vérité probable, soit une existence possible :
- Si je dis : « Il est possible qu’il y ait des petits hommes verts sur Mars » je parle de l’existence d’êtres qui sont réels.
- Mais si je dis « Il est possible qu’on ait raison de croire à l’existence de petits hommes verts sur Mars », l’hypothèse vise la validité de mon affirmation. Et ce n’est plus la même chose.
Mais alors, comment raccorder ces deux niveaux ? Ne risque-t-on pas d’additionner des choux, des navets, et mèches tarières ?
--> Picasso est un artiste qui n’est pas spécialement connu comme illustrateurs de manuels scolaires : on supposera qu’il ne parle pas de la connaissance, mais de l’existence réelle.
Picasso a toujours été critiqué, et même moqué pour les libertés qu’il prenait avec la réalité, alors même qu’il est effectivement un peintre figuratif. On disait de lui : « Voyez ces tableaux : on y voit des femmes qui ont un œil à la place du nombril, et les seins sur les épaules. Elles ont dû fuir épouvantées en se voyant dans les portraits qu’il faisait d’elles ».
Les braves gens disaient la vérité concernant ce qu’ils voyaient. Mais Picasso ne disait rien ; il nous montrait une autre réalité, qui était possible dans son esprit avant qu’il la peigne. Et qui maintenant est devenue réelle.
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(1) Du genre « Je ne cherche pas, je trouve » que nous avions illustrée naguère.

Monday, January 30, 2012

Citation du 31 janvier 2012

Les hommes n'aiment point être dupés, ils n'ont pas tous une naïveté assez considérable pour croire qu'un agrégé de philosophie est en vertu de sa fonction un terre-neuve ou même une personne respectable.
Nizan – Chiens garde, 1932, p.15. (1)
Que n’a-t-on dit de Bernard Henri-Lévy (alias B.H-L) à propos de son influence sur les autorités françaises dans le déclenchement des opérations militaires en Lybie ? Combien ont dénoncé ses foucades d’intellectuels et sa prétention orgueilleuse à se parer des plumes du paon, alors qu’il n’aurait été tout au plus qu’une petite mouche du coche ?
Pourtant voilà quelqu’un qui a utilisé sa notoriété d’intellectuel (2) pour appeler à la mobilisation au côté des rebelles libyens. Il l’a fait, et même si aujourd’hui on crie à la manipulation de la part des islamistes, il n’en reste pas moins qu’on a pu alors épargner pas mal de vies innocentes.
Revenons à la citation de Nizan, qui nous interroge plus généralement sur la fonction des intellectuels (en l’occurrence : les agrégés de philo) : gardez-vous, nous dit-il, de croire que ces gens sont « ès-qualité » des terre-neuves ou même des personnes respectables.
Admettons qu’ils ne le soient pas : mais faut-il le leur reprocher, comme si ils trahissaient leur fonction naturelle ? Ou bien faut-il dire : ces gens sont comme tous les autres, il y a la même proportion de saints et de filous que partout ailleurs…
Mon expérience des agrégés de philosophie c’est que souvent ils sont complètement fermés à la vie politique – voire même à la réalité quotidienne – et que les imaginer soutenant le pouvoir par intrigue est proprement hilarant.
Un souvenir : nous sommes dans un village de vacances, entre philosophes rassemblés pour un colloque (sur la citoyenneté je crois). Au petit déjeuner, nous discutons du cogito : je sais que ça parait être caricatural, mais c’est comme ça. Mon voisin, un spécialiste d’histoire de la philosophie, ouvre son yaourt. Tous en polémiquant à propos de Descartes, il verse hardiment le contenu du pot de yaourt dans sa tasse de café, dont bien sûr il avait oublié l’existence.
Comment voulez-vous que des gens comme ça puissent être des chiens de garde de la bourgeoisie ?
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(1) « En avril 1932, Nizan publie chez Rieder Les Chiens de garde, féroce pamphlet contre la philosophie universitaire de l’époque. Il y dénonce avec violence les philosophes en place, « chiens de garde de la bourgeoisie » qui, face aux ravages provoqués par la crise économique, aux exactions et à la violence de la colonisation, à la montée du fascisme en Europe, ont choisi de se taire plutôt que d’agir, au nom de l’Esprit et des valeurs abstraites et éternelles qui dissimulent la réalité. » A lire ici
(2) J’en vois qui font la moue : un intellectuel, ça ? Je rappelle que Sartre était l’objet de pareilles moqueries, comme si l’auteur de l’Etre et le Néant ne pouvait être un vrai philosophe.

Sunday, January 29, 2012

Citation du 30 janvier 2012

Si quelqu'un ne veut pas travailler, qu'il ne mange pas non plus
Saint-Paul - Seconde épitre aux Thessaloniciens - 3, 10 (1)
Qui ne mange pas n’a pas besoin de travailler.
H-D Thoreau - Walden p. 256
Petit rappel : ces propos sont ceux de l’ascète de Thoreau (2), pour qui le gros mangeur était un homme réduit à l’état de larve.
Mais en généralisant un peu, on arrive à des idées subversives, telles que : évitons de passer notre vie à travailler. Et donc : pour faire des économies de travail, entrainons-nous à moins consommer.
Idées subversives aussi parce qu’on trouve aujourd’hui que, ce qui paraît moral, ce n’est pas de cesser de consommer, mais plutôt de consommer le plus possible, à condition de ne consommer que français.
L’idée de Thoreau est donc qu’il faudrait prendre à l’envers le processus qui nous est habituel : au lieu de se demander comment gagner plus, et à partir de là, comment dépenser tout ce bel argent, demandons-nous : de quoi avons-nous vraiment besoin ?
Puis une fois réalisé cet inventaire, demandons-nous : combien de temps faut-il travailler pour satisfaire nos besoins utiles – et seulement eux.
Quand on lit Walden, le livre où Thoreau raconte son expérience de vie dans une cabane au fond des bois, on est surpris d’y trouver des pages détachées de son livre de comptes (3). Quel intérêt ?
C’est que, justement, Thoreau veut nous montrer qu’on peut vivre – et bien vivre – avec très peu d’argent, et que ce peu d’argent, on peut le gagner en peu de temps.
C’est donc cela la morale de Thoreau : plutôt que de gagner de l’argent, gagnons du temps.
Pourquoi ne suivons-nous pas ce conseil ? Pour faire ce que saint Paul nous prescrit, mériter de vivre en accédant à l’autonomie ? J’en doute – et de toute façon l’ermite est auto-suffisant.
Ce que je crois, c’est que pour beaucoup de gens, le temps sans travail, qui est un temps libre, et que le temps libre est d’abord un temps vide.
- Or le temps vide est notre ennemi, parce qu’on ne sait quoi en faire, sinon penser à notre misère comme le disait Pascal. Simplement notre misère s’appelle maintenant : anxiété, angoisse, stress.
Travailler plus, c’est gagner plus ; mais c’est aussi et surtout penser moins – pour éviter l’angoisse existentielle.
Mais ça, l’ermite de Thoreau, il n’en avait pas besoin.
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(1) Déjà cité le 8.5.07
(2) Thoreau – Walden ou la vie dans les bois, à lire en ligne ici.
(3) Par exemple dans le chapitre 7, avec le coût de la culture des haricots.

Saturday, January 28, 2012

Citation du 29 janvier 2012

L'enfer a été fait pour les curieux.
Saint Augustin – Les Confessions livre XI


Citation décorant un tapis de souris (en polyester durable)

Curieuse citation, ou plutôt, curieux usage d’une citation.
Alors que saint Augustin est, dans le livre XI des Confessions, aux prises avec la compréhension du temps et donc que l’enfer y incarne les souffrances du philosophe confronté à l’énigme du temps (qu’on ne peut réellement ni comprendre ni renoncer à comprendre), voilà qu’on propose un tapis de souris qui nous interpelle avec cette citation.
Ma curiosité à moi, c’est : Pourquoi ?
Pourquoi avoir choisi cette phrase pour servir de champ de course pour la souris de notre ordinateur (1) ?
Hypothèse 1 : l’ordinateur sert fréquemment à flâner sur Internet, activité qui est généralement l’aboutissement de la curiosité. Or, on sait qu’Internet apporte à notre curiosité des ressources inconnues jusque-là. D’où l’avertissement du Tapis de souris, destiné à nous détourner de cette passion supposée malsaine.
Hypothèse 2 : celui qui a conçu et fabriqué ce tapis de souris ne s’en servait pas lui-même. Il l’a réservé à la vente donc à aux autres qui ne peuvent qu’être des petits curieux, alors que lui est animé du désir de faire progresser l’humanité dans la voie de la science et du progrès technique.
Et donc je suppose que notre homme a un tapis de souris qu’il se réserve avec une citation bien glorifiante. Du genre :
L'art, c'est l'homme ajouté à la nature. (Bacon)
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(1) On connait les hippodromes, les cynodromes, faudrait-il, pour désigner les tapis de souris, inventer les muscodromes (de mus, musculus, nom scientifique de la souris) ?

Friday, January 27, 2012

Citation du 28 janvier 2012

…est bien fou du cerveau / Qui prétend contenter tout le monde et son père.
La Fontaine – Le meunier, son fils et l'âne - 1668.

- Est bien fou du cerveau… Peut-on être fou d’autre part que du cerveau ? S’agit-il d’une redondance visant un effet comique ? Ou bien « fou » signifierait-t-il ce qui est irrégulier, incontrôlable (herbes folles), voire même « détraqué » (la patte folle) ?
Chacun choisira un sens, sans se soucier de ce qu’en penseront les spécialistes, méprisant les critiques qui ont accablé le meunier et son fils.
- Qui prétend contenter tout le monde et [par-dessus le marché] son père : que signifie donc ce renchérissement final ? S’agit-il encore d’une redondance ? Ou bien « le père » serait-il plutôt une allusion à la Grèce, mère des sciences et des arts – ce qui situerait notre fable dans le contexte de la Querelle des anciens et des modernes ?
Là encore ; ignorons ces hésitations, puisque nous sommes libres, comme nous y invite l’auteur, d’inventer un sens nouveau s’il nous vient à l’esprit.
=> Quelle différence entre ce qu’attend de moi « tout le monde », et puis ce qu’attend de moi « mon père » ?
- Pour « tout le monde », je suis un individu situé dans le présent, soumis aux contraintes actuelles : chacun attend donc de moi une conduite efficace dans ce contexte.
La Fontaine nous montre aussi que ce n’est pas facile de satisfaire tout le monde puisque chacun aura un avis différent (1).
- Pour « mon père », je suis le fils qu’il a voulu, qu’il a imaginé dans un rôle bien précis, comme de réussir ce qu’il a loupé dans sa vie, ou de prendre sa succession dans son métier.
Comme je suis missionné pour une tâche déterminée, voulue avant même ma naissance, je ne peux contenter mon père et en même temps satisfaire aux exigences du monde actuel, tenant compte de ce qui m’environne, de mes capacités réelles, etc…
Ainsi donc, Freud aurait lu non seulement les tragédies grecques, mais aussi les Fables de La Fontaine ?
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(1) Il me vient à l’idée que celui qui voudrait réécrire cette fable aujourd’hui devrait remplacer le Meunier par le sélectionneur de l’équipe de France de football.

Thursday, January 26, 2012

Citation du 27 janvier 2012

Père et mère, c'est mari et femme ; l'homme et la femme ne sont qu'une même chair."
Shakespeare – Hamlet, IV, 3 - 1603.

Publié dans le journal Libération

Quand Libé a demandé à quelques dessinateurs de faire le portrait de leur père et de leur mère, voici ce que Killoffer a produit. Rappelons que Patrice Killoffer est l’actuel illustrateur de Fantômette éditée par la Bibliothèque rose. A qui faire confiance ?
1 – J’ai ce dessin dans mes archives depuis pas mal de temps, sans arriver à le publier. C’est qu’il tape très fort sur l’inconscient sans même qu’on ait besoin d’imaginer qu’il représente les parents.
2 – C’est Hamlet qui m’a décidé (1) : d’abord parce qu’il souligne (dans notre citation) ce qu’on oublie toujours à propos de ses propres parents ; ils sont un homme et une femme, ils sont la même chair, ils ont donc copulé, ne serait-ce que pour nous produire.
Ma résistance à cette image de Killoffer vient donc peut-être du refoulement de la scène primitive dont parle Freud.
3 – Mais aussi, Hamlet, c’est l’histoire d’un assassinat. Le père d’Hamlet a été assassiné par son frère qui a versé un poison dans son oreille pendant qu’il dormait.
--> Or : en quoi consiste l’oreille représentée ici ? Et ce que le père pourrait y déverser serait donc un poison ?
Stop ! Je me sauve avant qu’on me jette des cailloux.
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(1) Hamlet… et Frankie Pain : voir ici.

Wednesday, January 25, 2012

Citation du 26 janvier

Quand même tu aurais à vivre trois mille ans, et trois fois dix mille ans, dis-toi bien que l'on ne peut jamais perdre une autre existence que celle qu'on vit ici-bas…
Marc-Aurèle – Pensées pour moi-même (livre II, paragraphe 14)

A quoi bon l’éternité pour ne rien faire ?
Miss.Tic (Vœux pour 2012)


Alors, ça ! J’ai écrit un nombre insensé de Posts pour expliquer que Miss.Tic est une épicurienne, et voilà que je la découvre stoïcienne ? Marc-Aurèle plutôt que Lucrèce ? Et quand on sait les conflits qu’il y a eu entre ces écoles, je n’imagine pas un seul instant qu’on puisse tenter la synthèse.
Bref : ce qui compte, ce n’est pas la vie devant soi, mais la vie en soi, c’est à dire non pas l’avenir, quand bien même il serait éternel, mais le présent.
Toutefois, rappelons-nous le choix d’Achille : mourir à 20 ans en héros est plus enviable que de vivre jusqu’à 70 ans en étant obscur berger d’Arcadie – et Achille n’était pourtant ni épicurien ni stoïcien.
Passons – Néanmoins, la question n’est pas réglée dès lors qu’on nous dit qu’il vaut mieux vivre pleinement le présent plutôt que d’espérer un long avenir.
--> Car que peut-on espérer du présent ?
C’est là que le message de vœux de Miss.Tic se dévoile : regardez les fragments d’image qui entourent la Miss. On ne s’est pas amusé à découper le catalogue de la Redoute pour passer le temps. C’est là que se situe le message : fragments de corps nus, fesses galbées, seins et pectoraux à faire péter la peau : rien que du désirable, découpé selon les fantaisies du désir.
Voilà ce que nous souhaite Miss.Tic. Et si ça peut aussi durer Éternité, allons-y.

Tuesday, January 24, 2012

Citation du 25 janvier 2012

L'enfer est trop petit pour tout le monde.
Claire de Lamirande – La Neige de mai

On ira tous au paradis, Même moi.
Chanson de M. Polnareff / J.L. Dabadie

Question : qu’est-ce qu’on peut faire au Paradis, qu’on ne pourrait pas faire en Enfer ?
Réponse : y aller avec tout le monde.
Curieux ça… Est-ce que ça voudrait dire qu’on ne peut jouir de Paradis, qu’à condition d’y être avec l’humanité entière ? Que l’Homme ne se retrouve que dans la totalisation de tous les individus de son espèce – et donc que vouloir priver cette Humanité de l’un de ses membres, c’est la dénaturer et par là faire souffrir l’ensemble des hommes individuels ?
--> Que – par exemple – l’absence d’Hitler, de Staline et de Pol Pot au Paradis suffirait pour en faire un Enfer ?
Non, n’est-ce pas ? Pareille idée est un blasphème.
Par contre on trouve quand même l’idée que, si le Paradis est toujours assez grand pour accueillir tout le monde, l’Enfer est un lieu possédant une certaine surface, un certain volume et que, comme tel, il a une capacité limitée qu’il ne peut dépasser. L’enfer serait comme les wagons des trains de la déportation, prévus pour "40 hommes" - ou "8 chevaux (en long)" ?
Quel sens donner à cette asymétrie ? Y a-t-il une vérité théologique qui se glisserait dans ce paradoxe ?
Voilà ce que je suggère : alors que le Paradis a été conçu par le Seigneur comme devant recevoir toute l’humanité – étant entendu qu’Adam a été conçu sans tâche, et que d’autre part, l’Omniscient sait d’emblée combien d’hommes verront le jour au cours de l’histoire de l’humanité – l’Enfer a été bricolé après la Faute par l’Ange déchu, le quel n’étant pas omniscient l’a dimensionné selon la taille de l’humanité de l’époque et selon les statistiques de la damnation.
De toute façon, puisqu’il y a un système de vases communicants entre le Paradis et l’Enfer (plus d’âmes en Enfer = moins d’âmes au Paradis), je ne sais pas si on va manquer de place en Enfer, mais je suis sûr qu’on ne risque pas d’en manquer au Paradis.

Monday, January 23, 2012

Citation du 24 janvier 2012

… je suis convaincu que les progrès mal appliqués de la photographie ont beaucoup contribué, comme d’ailleurs tous les progrès purement matériels, à l’appauvrissement du génie artistique français, déjà si rare
Baudelaire – Le salon de 1859 (2 – Le public moderne et la photographie)Lien
Bien que Baudelaire ait accepté de poser devant l’objectif de Nadar (ci-contre), il exprime une méfiance très grande devant ce nouveau procédé qu’est (encore en 1859) la photographie (voir Annexe).
La crainte exprimée par Baudelaire est que la photographie apparaisse comme la rivale de la peinture, qu’elle puisse reproduire la réalité avec une exactitude que les artistes peuvent viser sans jamais l’atteindre. Qu’elle soit une copie « industrielle » de la nature, alors que l’art en serait la copie « manuelle ».
Bien entendu, ce qui est critiqué ici par Baudelaire ce n’est pas directement la photographie, mais son usage au service du naturalisme, de cette perversion de l’art qui en fait un sous-produit de la nature (1).
Mais quand on voit à quel usage Baudelaire réserve la photographie (voir texte en annexe), on se rend compte que l’archaïsme du procédé n’est en rien responsable de cette lecture de cette nouvelle technique. En effet, la photographie est selon Baudelaire un procédé mécanique, quelque chose qui vient après l’activité spirituelle humaine, autrement dit ce qui ne comporte aucune part de création. C’était d’ailleurs une opinion très courante à l’époque, qui voyait en la photographie la possibilité de représenter enfin la réalité telle qu’elle était sans les déformations liées à la subjectivité de l’artiste.
Inutile de dire qu’aujourd’hui nous voyons au contraire dans la photographie une nouvelle façon de créer une œuvre, et qu’elle ne peut de ce fait entrer en compétition avec la peinture. Tout juste a-t-elle délivré les peintres de l’obligation de rendre la réalité non pas telle qu’ils la voyaient, mais telle que tout le monde la voyait.
Mais ce texte de Baudelaire nous apprend tout de même quelque chose : c’est que devant une innovation technique, nous sommes désarmés : quel usage en faire ? Nous ne parvenons qu’à insérer cette nouvelle technique dans la panoplie des techniques déjà existantes.
Voyez par exemple le cinéma en 3D. Quel usage vraiment créateur faire de cette nouvelle capacité ? Tout ce que j’ai vu pour ma part, c’est qu’au moment des publicités, on arrivait à projeter l’image vers les spectateurs pour les impressionner. Faire flotter des fraises Tagada dans la salle : on n’a pas beaucoup progressé depuis que les frères Lumières projetaient le train arrivant en gare de la Ciotat sur les premiers spectateurs de leur cinématographe.
On pourra sans doute, dans un avenir rapproché, remplacer les fraises Tagada par une starlette aux gros nichons : ce n’est pas comme ça qu’on répondra à l’injonction baudelairienne d’empiéter sur le domaine de l’impalpable et de l’imaginaire (voir texte joint).
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(1) Quelle est la valeur de l’art ? Le vrai ! répond le naturaliste. Le Beau ! répond Baudelaire.
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Annexe.
« Il faut donc qu’elle [la photographie] rentre dans son véritable devoir, qui est d’être la servante des sciences et des arts, mais la très humble servante, comme l’imprimerie et la sténographie, qui n’ont ni créé ni suppléé la littérature. Qu’elle enrichisse rapidement l’album du voyageur et rende à ses yeux la précision qui manquerait à sa mémoire, qu’elle orne la bibliothèque du naturaliste, exagère les animaux microscopiques, fortifie même de quelques renseignements les hypothèses de l’astronome ; qu’elle soit enfin le secrétaire et le garde-note de quiconque a besoin dans sa profession d’une absolue exactitude matérielle, jusque-là rien de mieux. Qu’elle sauve de l’oubli les ruines pendantes, les livres, les estampes et les manuscrits que le temps dévore, les choses précieuses dont la forme va disparaître et qui demandent une place dans les archives de notre mémoire, elle sera remerciée et applaudie. Mais s’il lui est permis d’empiéter sur le domaine de l’impalpable et de l’imaginaire, sur tout ce qui ne vaut que parce que l’homme y ajoute de son âme, alors malheur à nous ! » Baudelaire – Le salon de 1859

Sunday, January 22, 2012

Citation du 23 janvier 2012

Rien de plus capable de nous affaiblir l'âme et de nous abrutir, que d'avoir toujours devant les yeux que la providence nous doit à tous la même somme de biens et de maux.
Pierre Leroux (1797-1871) – De l'humanité, de son principe et de son avenir
Pierre Leroux, fils d’un cabaretier de la place des Vosges, sut très tôt que la survie dépend des efforts de chacun. C’est ainsi que reçu au concours d'entrée à l'école polytechnique en 1814, il renonce à ses études pour aider sa mère, devenue veuve, et ses trois frères. Il se fait maçon puis se met en apprentissage chez un cousin imprimeur.
Qu’est-ce que Pierre Leroux attaque ici ? L’utopie égalitaire ? L’Etat providence ?
Il ne fut pas un apôtre de ce que nous appellerions aujourd’hui l’anti-étatisme libéral – lui dont la mort coïncida avec la Commune de Paris qui délégua des représentants à ses obsèques.
Mais alors, que veut Pierre Leroux ? Ou plutôt, que ne veut-il pas ?
Je suppose qu’il n’était pas contre le fait que tout le monde bénéficie des mêmes biens, et que personne n’ait plus de maux que ses voisins.
Mais qu’en revanche, en appelant la providence à la rescousse, on revendique des bienfaits de la société, sans jamais lutter pour les obtenir, voilà sans doute ce qui « affaiblit l’âme ». L’homme est fait pour la lutte ; il doit sa survie à cela et rien ne peut lui venir sans qu’il ait affronté l’adversité pour l’obtenir. Voilà donc ce qu’il y a de débilitant dans la croyance en la providence : ne faisons rien – Dieu y pourvoira. (1)
Alors, voilà où nous en sommes aujourd’hui : on nous rabâche à longueur de campagne électorale que rien ne se fera dans notre pays sans la présence d’un habile capitaine au gouvernail. Aucune justice sociale sans les prestations de l’Etat. Aucun progrès économique sans la science et la prévoyance de nos futurs gouvernants.
Que dirait Pierre Leroux de ça ? Et que dirait-il encore en constatant que les syndicats sont dans le silence, et qu’ils n’en sortent que pour aller négocier avec le pouvoir ?
Nous, notre seule violence, c’est le bulletin de vote. Après tout, c’est sans doute ça qu’on appelle le progrès.
Qu’on attende donc la providence – si on veut ; mais qu’on n’en attende pas des miracles !
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(1) On trouverait la même idée chez Marx et Engels dans le Manifeste du parti communiste (1848) : contrairement à ce qu’on imaginerait, Marx n’est pas contre le travail des enfants dans les fabriques, mais contre la façon dont il est pratiqué. Les enfants doivent travailler en production parce que c’est là le complément indispensable de leur éducation.
« Éducation publique et gratuite de tous les enfants. Abolition du travail des enfants dans les fabriques tel qu'il est pratiqué aujourd'hui. Combinaison de l'éducation avec la production matérielle, etc. » Manifeste, II - Prolétaires et communistes

Saturday, January 21, 2012

Citation du 22 janvier 2012

De nombreux actes de bravoures ont été réalisés cette nuit-là mais aucun ne fut plus courageux que celui de ces quelques hommes [= les musiciens de l’orchestre], jouant minute après minute alors que le navire s'installait tranquillement de plus en plus bas dans la mer... La musique qu'ils jouaient faisant office de leur propre requiem immortel et de leur droit à être inscrits sur les tablettes de la gloire éternelle.
Lawrence Beesley (Un rescapé du Titanic)

On se plait à rapprocher le naufrage du Costa-Concordia de celui du Titanic. Occasion de souligner la couardise du capitane pas-courageux, et aussi l’extraordinaire continuité des naufrages de paquebots, alors même que la confiance dans le progrès de la construction navale faisait croire que pareille situation ne pourrait plus jamais se produire.
C’est vrai. Mais, ce qui a changé tout de même, ce sont les images du naufrage. On voit aujourd’hui des vidéos de l’évacuation des passagers, on a les photos incroyables de ce géant des mers, couché sur le flanc comme une baleine crevée… Tandis qu’on ne dispose pour le Titanic que de dessins faits d’après l’imagination des reporters et peut-être d’après les récits des rescapés.
Peut-être, mais pas sûr : voyez cette gravure montrant le Titanic s’enfonçant par la proue dans l’océan, cheminées fumantes et brillamment illuminé de tous ses ponts et de toutes ses cabines. Lawrence Beesley raconte qu’au contraire, il a été alerté par l’arrêt des machines, puis par l’obscurité.
Oui, mais… Il est beaucoup plus dramatique de représenter le navire s’enfonçant dans les flots avec toute la brillance de la vie mondaine qui régnait à bord. Cette dramatisation est également ce qui sous-tend le récit cité ici : l’orchestre qui continue imperturbablement à jouer (on imagine des valses de Vienne), tandis que l’eau monde sur la piste de danse…
La dramatisation est en effet beaucoup plus facile quand on fait appel à l’imagination : c’est ce que les reportages des vidéos amateurs détruisent plus qu’autre chose.
J’ai quand même été frappé par les récits du Concordia racontant que nombre de femmes sont descendues des canots de sauvetage encore en robe du soir. J’imagine les rescapées du Titanic comme ça.

Friday, January 20, 2012

Citation du 21 janvier 2012

Mais notre règne arrivera / Quand votre règne finira (Bis):/ Nous tisserons le linceul du vieux monde, / Car on entend déjà / la révolte qui gronde.
Les Canuts, chant de la révolte des ouvriers soyeux lyonnais (1830)


- Ci-contre : une centaine de salariés de Lejaby, le 17 janvier à Lyon dans la Cour des Voraces, lieu emblématique de la révolte des canuts (1).

Les combats des ouvriers pour leur emploi n’a pas d’histoire : ou plutôt, c’est toujours la même histoire qui se répète.
Je sais bien que ça fait vieux ronchon, mais qu’importe ? Ce combat, c’est toujours celui de l’être humain qui refuse d’être réduit à l’outil :
1 – La révolte des Canuts lyonnais.
Le Patron : vous êtes dépassé par les métiers à tisser mécaniques (2). Je dois vous licencier (variante : baisser votre salaire).
Les Canuts : Nous n’avons rien à perdre : nous irons jeter dans le Rhône vos métiers mécaniques. (Variante : Nous tisserons le linceul du vieux monde, / Car on entend déjà / la révolte qui gronde.)
2 – La grève des Lejaby (du nom de l’entreprise fabriquant de lingerie féminine), licenciées pour cause de délocalisation en Tunisie de leur usine à Yssingeaux (Haute-Loire) – la dernière opérant en France.
Le Patron de Lejaby : vous ne pouvez produire au tarif tunisien. Je ferme l’usine et je la reconstruis à Sfax.
Même histoire ? Même cause, mêmes effets ?
Oui, c’est bien sûr toujours le choc de la logique économique contre l’humain.
Les canuts se battaient pour leur vie ; et ils refusaient d’être concurrencés par des machines.
Les Lejaby se battent bien sûr pour conserver leur gagne-pain ; et, comme les canuts, elles refusent une concurrence : celle des salaires.
Mais il ne faudrait pas croire qu’à un siècle et demi de distance rien n’a changé : les ouvriers d’aujourd’hui ne rencontrent plus devant eux ni fusils ni mitraille.
--> Retour sur l’actualité récente : les ouvrières de Lejaby se sont invitées au siège social de Lejaby, à Rillieux-la-Pape. Et là, elles ont découvert un incroyable stock de lingerie invendue. Tout le produit de leur travail, qu’elles avaient fait du mieux qu’elles pouvaient, soumises à la tyrannie du chronomètre pour être compétitives, voilà ce que la loi de la concurrence en avait fait : un tas de chiffons invendables.
Le Patron de Lejaby faisait les plans de redéploiement de l’entreprise hors de France, en laissant croire aux ouvrières qu’elles arrivaient – péniblement, mais quand même – à atteindre les objectifs qu’il leur avait fixés.
Les Lejaby ne sont plus des femmes : elles ne sont rien d’autre qu’un outil de production. Quand l’outil produit des chiffons au lieu de produire de la belle lingerie, il n’y a plus qu’à le jeter.
Et voilà sans doute la raison pour laquelle ces ouvrières paraissent sur la photo munies d’un masque blanc. Ce n’est sûrement pas pour ne pas être reconnues, mais plutôt parce qu’un être humain, réduit à n’être qu’un outil périmé, n’a plus d’identité.
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(1) Cour des Voraces : Il s’agit d’une cour d'immeuble lyonnais qui a servi de refuge aux ouvriers canuts lors de leurs révoltes (1848). Cette cour devint célèbre, par une bataille qui opposa les canuts aux soldats de l'armée régulière. (Lire la suite ici)
(2) Je reprends la thèse de la révolte issue du développement des métiers mécaniques jacquard. A vérifier

Thursday, January 19, 2012

Citation du 20 janvier 2012

C'est à l'audace de leurs fautes de grammaire que l'on reconnaît les grands écrivains.
Henry de Montherlant
1 – Il y aurait donc deux types différents de fautes de grammaires : les « audacieuses » et les ordinaires ?
Certains feraient des fautes de grammaires inconsciemment, et les autres « consciemment » ?
Ces derniers « insulteraient » notre oreille (comme le fit Martine à l’encontre de Philaminte dans ce passage des Femmes Savantes de Molière) en violant intentionnellement la règle et le bon usage ; les premiers se borneraient à fabriquer leurs phrases un peu au hasard et tant pis pour la concordance des temps : Si j’aurais su, j’aurais pas venu
On trouverait un équivalent en musique avec les dissonances. Les premières ont été intentionnelles, faites pour blesser l’oreille – ou pour la faire dresser – quand une rupture dans la phrase musicale s’imposait. Et puis on n’y fit plus attention, on ne l’entendit même plus.
2 – Les fautes de grammaires audacieuses seraient la marque des grands écrivains.
Autant dire que :
a – la grammaire n’est qu’un instrument que l’écrivain peut mettre à son service, et non l’inverse.
b – conçu comme une contrainte, cet instrument est une limite imposée à l’expression de la pensée ; une pensée véritablement créatrice peut – et doit – s’en affranchir.
c – si la force et l’originalité de la pensée impose ces fautes, alors, réciproquement, leur présence atteste de l’existence d’une telle pensée.
Bon – mais quel besoin avons-nous d’un pareil marqueur ?
D’ailleurs, saurions-nous le remarquer, nous pour qui le beau langage et devenu simplement « chiant » (ah ! J’insulte encore Vaugelas !) ; nous dont la grammaire ne comporte qu’une règle : faire des phrases qui ne dépassent pas 5 mots et des Tweets de pas plus de 140 signes.
… Quoique… Je trouve cette vidéo intitulée L’art de bien twitter : La contrainte formelle.
Oui, vous avez bien lu : ici aussi, comme du temps de Molière, il y a une « Contrainte formelle ».
Y aurait-il une grammaire du tweet ? Peut-être. Toutefois ma vidéo dure 2’50. Il n’est pas sûr que Grevisse sache faire aussi court. (1)
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(1) En plus de ne pas connaitre Vaugelas, vous ne connaissez pas Grevisse non plus ? Pas grave : cliquez ici.

Wednesday, January 18, 2012

Citation du 19 janvier 2012

Les héros doivent toujours quitter la ville. Parce que nul n'est prophète en son pays, parce qu'il faut toujours sortir pour prêcher, et donc prêcher toujours ailleurs, et donc toujours quitter. Pour se refaire une virginité.
Christine Angot – Quitter la ville
Se refaire une virginité
Il m’arrive parfois de donner une citation uniquement parce qu’elle est un prétexte à évoquer une idée.
Aujourd’hui c’est un peu le cas : l’idée est celle de la virginité qu’on pourrait – ou non – refaire.
La question est : peut-on « refaire » une virginité – la virginité n’est-elle pas, comme la pureté dont elle est le signe, ce qu’on ne peut retrouver après l’avoir perdu ?
L’exemple étant bien sûr la virginité féminine, dont certaines cultures font encore aujourd’hui la condition de l’acceptation des femmes non mariées dans la société. Sans parler des religieux …
La preuve que la virginité est irrémédiablement perdue dans le mariage est bien que, pour la Vierge Marie, il n’a pas fallu moins de trois miracles pour sauver sa virginité (1) : vierge même mariée ; vierge après avoir été fécondée ; vierge après avoir enfanté.
Je laisserai de côté la question du sens de la perte de virginité des femmes mariées ; après tout l’enfantement est saint et le sourire de l’enfant est un reflet de celui du Seigneur.
Par contre, élargissant le sens de la virginité à la pureté morale, on pourrait se demander d’où vient cet aspect irrémédiable de sa perte : pourquoi ne pourrait-on pas, comme le suggère Christine Angot, se refaire une virginité ?
Je suggèrerai que cette impossibilité renvoie au temps de la faute : la faute morale est essentiellement temporelle, inscrite dans l’histoire du sujet. Ce qui veut dire que, pas plus qu’on ne peut remonter le temps pour modifier les évènements passés, on ne peut faire que la faute n’ait pas été commise.
C’est cela qui fait la souffrance morale et le remord cuisant : « A tout jamais tu seras celui qui a commis cette faute. Tu peux toujours te faire pardonner : ta faute sera surmontée ; ce n’est pas pour autant qu’elle sera effacée ».
Certains torturés de la conscience font le même syndrome avec l’échec : « A tout jamais tu seras celui qui a loupé son bac l’année de tes 18 ans ! »
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(1) Une gâterie pour vous, chers lecteurs : la vidéo de l’abbé Guy Pagès consacrée à la virginité perpétuelle de la Mère de Jésus. Un régal.

Tuesday, January 17, 2012

Citation du 18 janvier 2012

On ne voyage pas pour voyager mais pour avoir voyagé.
Alphonse Karr
Quel voyageur êtes-vous ?
De ceux qui feuillettent fébrilement les brochures des voyagistes pour trouver le Tour Operator qui mettra au programme du voyage en Malaisie un détour par un village perdu en montagne où l’on vous fera assister à la Cérémonie du buffle ?
Et en plus, ces voyageurs-là ont des quantités d’appareils numériques pour photographier, filmer, enregistrer… Malheur à leurs amis qui accepteront l’invitation au barbecue de retour !
Bref : des gens comme ça, on n’est pas prêt d’oublier qu’ils ont voyagé, parce que en partant en voyage ils ne pensaient qu’au retour, ce n’est pas l’étrange nouveauté qu’ils visaient, mais une manière de briller dans leur environnement familier.

Mais vous, vous êtes peut-être plutôt du genre à voyager comme Kerouac, sac à dos, pouce levé sur la Route 66 ? Ces voyageurs-là appartiennent plus à la race des pionniers, qui cherchent de nouvelles frontières mais ne se soucient pas du retour.
Oui, c’est cela la différence : le retour.
Les uns ne partent que pour revenir, et encore : non pas plein d'usage et raison, mais les poches bourrées de clés USB.
Pour les autres, le retour est souvent une déroute – et c’est un peu le cas de Kerouac. A moins que le retour soit l’occasion de rêver au prochain départ. J’ai connu un jeune homme qui démissionnait de son job avant de partir en voyage, et qui ne rentrait qu’une fois épuisées ses ressources.
Celui-là, ce n’est pas pour raconter ses voyages qu’il rentrait chez lui, mais parce qu’il n’avait plus de thune.
Mais peut-être ses poches étaient-elles vides comme les poches crevées d’Arthur Rimbaud ?

Monday, January 16, 2012

Citation du 17 janvier 2012

Au reste, si l'éducation de la jeunesse est négligée, ne nous en prenons qu'à nous-mêmes et au peu de considération que nous témoignons à ceux qui s'en chargent.
D'Alembert (1717-1783) – (Article "Collège" de l'Encyclopédie) (1)
Bien des sociologues ont fait de la perte de considération sociale l’origine du malaise des enseignants. Autrefois, disent-ils, l’instituteur du village était considéré comme un notable. Le père reconnaissait en lui l’homme grâce à qui son fils aurait une vie meilleure que la sienne. Et l’on pouvait s’adresser à lui pour tourner une lettre un peu difficile ou pour s’orienter dans le dédale de démarches administratives.
Aujourd’hui, malheur au professeur ou à l’instituteur qui se mêle de punir un élève turbulent ! Le père (parfois le Grand frère) l’attend à la sortie des classes, pour lui faire comprendre que ça ne va pas. Et bien sûr, malheur à celui qui se risquerait à confisquer le portable du petit qui échange des SMS pendant les cours.
Oui, mais voilà : ce que nos spécialistes ont relevé comme preuve de l’inexorable perte de l’autorité dans nos sociétés n’est pas si nouveau que cela et comme on le voit ici, l’Encyclopédie, en plein 18ème siècle, pointe déjà le phénomène et en fait la cause du manque d’éducation de la jeunesse.
Donc, ce qu’on savait déjà, c’est que le milieu familial est déterminant pour la réussite scolaire, et que la première figure de l’instituteur, c’est dans le foyer familial qu’elle se dessine.
Par contre l’école de d’Alembert n’est pas encore l’école obligatoire, laïque et républicaine, qui va mettre plus d’un siècle à apparaitre : c’est l’école de la paroisse, dévolue aux religieux, ou bien c’est avec le précepteur que ça se passe. Du coup, ce n’est pas comme chez nous du mépris barbare pour la culture que vient la perte de considération : comme le souligne le texte de (mis en note), d’Alembert dénonce la futilité et la frivolité.
L’écolier de d’Alembert n’est pas un fils de paysan ; c’est un petit marquis.
Reste que la leçon d’histoire est la suivante : les vicissitudes de l’école sont l’exact décalque de la réalité sociale.
--> Le rôle que certains veulent faire jouer à l’école (réparer la casse sociale) devient alors impossible : comment être l’effet de la société et prétendre malgré tout en modifier les mécanismes ?
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(1) Voici le paragraphe : « Au reste, si l’éducation de la jeunesse est négligée, ne nous en prenons qu’à nous-mêmes, & au peu de considération que nous témoignons à ceux qui s’en chargent ; c’est le fruit de cet esprit de futilité qui règne dans notre nation, & qui absorbe, pour ainsi dire, tout le reste. En France on sait peu de gré à quelqu’un de remplir les devoirs de son état ; on aime mieux qu’il soit frivole. » (Article à lire ici)

Sunday, January 15, 2012

Citation du 16 janvier 2012

Comme ce romancier disait que «toutes les femmes sont fatales», tout homme politique qui tient la barre est providentiel - ou fatal: c'est l'endroit et l'envers de la même monnaie.
François Mauriac – Le nouveau Bloc-Notes (1958-1960)

La date de publication de ce texte invite à penser que Mauriac parle ici de Général de Gaulle, lors de son retour aux affaires, après 1958. Mais la généralité de son jugement nous invite aussi – mutatis mutandis – à penser à Notre-Président, qui a incarné lors de son élection cet homme providentiel que le peuple appelait de ses vœux.
=> Petit rappel de l’histoire récente de la France pour ceux qui liraient ce Post en dehors de nos frontières : en 2007, le peuple français est bien déprimé ; Paris a perdu l’organisation des Jeux Olympiques, le déclin économique est à nos portes, et la classe politique parle unanimement du redressement national. Vient cet homme, qui monte à la tribune et qui nous dit : « Je m’adresse à la France qui souffre : je ne vous mentirai pas ; je ne vous trahirai pas »
Bingo ! Il est élu…
Oui, mais : 5 ans après, S&P dégrade la note souveraine de la France.
- Au secours ! Vite, un nouvel homme providentiel ! Rappelez DSK !
Stop ! Gardons notre sang-froid, et réfléchissons d’abord à deux fois avant d’appeler un tel héros. Car, encore une fois, Mauriac est formel : vous ne pouvez avoir l’un (l’homme providentiel), sans avoir l’autre (l’homme fatal).
Bon, d’accord. Mais cela étant dit, pourquoi choisir tel candidat plutôt que tel autre ? S’il faut qu’il soit un homme ordinaire, pourquoi l’élire ? Ne vaudrait-il pas mieux faire, comme les Athéniens du temps de Périclès, un tirage au sort des magistrats qui vont gouverner la Cité ? (1)
Faisons donc l’économie de cette campagne électorale venimeuse et délétère. Tirons au sort le futur Président de la République Française.
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(1) Ne serait-ce pas justement pour avoir oublié leurs propres principes que les grecs en sont là arrivés là où ils sont maintenant ?

Saturday, January 14, 2012

Citation du 15 janvier 2012

- Lorsque le chat eut ce qu'il avait demandé, il se botta bravement, et mettant son sac à son cou, il en prit les cordons avec ses deux pattes de devant, et s'en alla dans une garenne.
Charles Perrault – Histoire du chat botté


- Mon chat beauté
Miss.Tic (Exposition "Chacun trouve son chat !")
- La chat Potté : le jeu de mot en français est un clin d’œil à son grand chapeau (1)
Wikipédia – Article Chat Potté

Pourquoi le chat est-il plus que tout autre animal sollicité par les faiseurs de calembours ? Nous en avons trouvé deux dans nos citations du jour, et sans forcer notre talent, nous pouvons aussi rappeler les chats de Siné qui ont été une inépuisable source de jeux de mots.
En fait, nous ne pouvons nous résoudre à considérer le chat comme un animal simplement domestique, quand bien même on lui accorderait le mérite d’avoir une présence sympathique comme animal de compagnie. Malgré nous, nous imaginons le chat capable de faire des choses extraordinaires, comme le Chat Botté (et son clone le Chat Potté) ; comme le Chat Beauté de Miss.Tic, qu’on suppose doué d’une grande puissance de séduction ; comme les Chats de Siné, et puis celui de Geluck…
Alors que le chien, avec sa chaleureuse affection, passe facilement pour un symbole de la famille, le chat malgré son amour du confort est aussi un animal aventureux, qui saute le mur du jardin sana demander notre avis, et qui nous revient plein d’horizons inconnus. Animal plein de ruses, comme chez Perrault, ou bien capable de transformations protéiformes (Siné), ou encore traçant son chemin dans les méandres de la philosophie (Geluck), il nous permet de sortir du quotidien.
Il n’y a guère que le chat séducteur de Miss.Tic qui parait un peu pantouflard. Mais qu’on se méfie : ce séducteur-là a sans doute toujours la griffe acérée ; malheur à qui l’oublierait !
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(1) Uniquement pour ceux qui ont le cerveau lent : ce chat Botté est un chat Potté parce qu'il est chapeauté.

Friday, January 13, 2012

Citation du 14 janvier 2012

Ce sont ceux qui ont peu de larmes qui pleurent vite le défunt.
Proverbe Africain

Douleur III
On aura reconnu dans cette photo une scène de désespoir aux obsèques de Kim-Jong-Il.
La stupéfaction devant ces expressions de désespoir et ces larmes, est venue de leur unanimité : ce sont des foules entières qui pleurent et se tordent de douleur ; même les soldats s’y sont mis.
--> La douleur, nous parait être une émotion individuelle, quelque chose qui surgit au sein de l’être et se manifeste à l’extérieur par débordement. Comment synchroniser de pareilles larmes ? Ce que les dirigeants nord-coréens prouvent en diffusant ces scènes, va bien au-delà de la preuve de l’attachement du peuple à son Leader Bien-aimé : ces larmes prouvent, si elles sont sincères, qu’existe une communauté d’âme dans ce peuple qui pleure … comme un seul homme.
Mais justement, faut-il aller jusque-là ? On sait bien qu’il y a des pleureuses professionnelles dans certains pays ; on connait aussi le proverbe africain cité aujourd’hui : Ce sont ceux qui ont peu de larmes qui pleurent vite le défunt.
Où situer la douleur du peuple Coréen lors de la mort de son Cher leader ? Du côté de l’unanimité de la douleur, ou bien dans la manifestation de masse, chacun étant habitué à prendre sa place dans un spectacle grandiose et collectif, comme dans les parades populaires lors des manifestations à la gloire du parti ?
Il y a bien des réponses, parmi lesquelles je choisis celle-ci : on est peut-être en face d’un phénomène de foule, comme le disait Le Bon dans son ouvrage sur La psychologie des foules. On sait que Freud lui-même salua cet ouvrage établissant « les modifications du moi lorsqu'il est au sein d'un groupe agissant » : c’est-à-dire la foule.
Simplement, en Corée du Nord, la foule inclut un peuple entier, et sa mobilisation est permanente.

Thursday, January 12, 2012

Citation du 13 janvier 2012

La douleur est toujours question et le plaisir, réponse.
Paul Valéry – Sensibilité (Cahiers)
Douleur II
Sans oublier la thèse sur l’insignifiance de la douleur (hier), acceptons du moins qu'elle soit l’occasion d’un questionnement.
Notons d’abord que Valéry, comme Comte-Sponville, n’accorde à la douleur aucun message : puisqu’elle ne fournit aucune réponse, elle ne nous apprend rien ; peut-être même qu’elle annule ce que l’on croyait savoir – qu’elle est une anti-leçon comme le disait Sponville (1).
Comment alors croire que la douleur soit une question ? Et quelle question ?
En nous aidant de la fin de la citation, qui à la question de la douleur, oppose la réponse du plaisir, nous devinons qu’il s’agit du sens de la vie. Le plaisir est l’épanouissement de la vie, la douleur sa négation, puisqu’on ne peut lui accorder une valeur qu’à condition de postuler un « après » de la vie, accessible grâce à ces souffrances, justement (qu’on repense aux doctrines religieuses sur le rachat de la faute(2)).
Si donc la douleur nous questionne, ce ne peut être que sur le sens de la vie – ou plutôt sur le sens qu’il y a à vivre : à quoi bon vivre si c’est pour souffrir indéfiniment ? Le suicide n’est-il pas la réponse à la question posée par la douleur ?
Dans l’antiquité, les épicuriens ne se suicidaient pas. En revanche les stoïciens en avaient fait une preuve de sagesse.
Quant à nous, remarquons qu’une bonne partie du débat concernant l’euthanasie est suggéré dans ce commentaire de la pensée stoïcienne : [Dans le stoïcisme], la mort volontaire peut se justifier rationnellement et est conforme à la nature dans des situations insupportables de souffrance, de maladie, de vieillesse ou d’asservissement, lorsque la vie a perdu son sens ou lorsqu’on n’est plus en mesure d’accomplir ses devoirs sociaux ou de vivre en honnête homme. (Encyclopédie Agora).
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(1) Se reporter au texte cité hier (pour les paresseux du clic, un petit extrait : « On parle pourtant des leçons de la douleur, et chacun, qui l'a vécue, y reconnaît quelque chose de son expérience. Mais ces leçons sont toutes négatives, ou critiques : la douleur n'apprend rien, qu'en annulant ce qu'on croyait savoir. Sa leçon est une anti-leçon. »)
(2) On pourrait penser aux martyrs qui, dans les tourments et les supplices, trouvent l’occasion de manifester la force de leur foi : « Je ne résiste à ces tourments que parce que Dieu m’en donne la force. Mon martyr témoigne de Son existence. »

Wednesday, January 11, 2012

Citation du 12 janvier 2012

La douleur est un fait, et ne veut rien dire. Elle n'a pas de sens, pas de valeur, pas d'excuses. Même atroce, elle est insignifiante
André Comte-Sponville – Une éducation philosophique (1)
L'homme est un apprenti, la douleur est son maître, / Et nul ne se connaît tant qu'il n'a pas souffert.
Alfred de Musset – La nuit d'octobre
(Déjà cité ici)
Douleur I
Pour qui (comme moi) arpente sans relâche les dictionnaires de citations en ligne, il est évident que certains préjugés y trouvent une expression, de par la fréquence de certaines citations.
Ainsi de la douleur, qui est le plus souvent évoquée comme signifiant quelque chose (ainsi que le montre la citation archi-connue de Musset).
Pourtant de temps en temps apparait une pensée différente, comme celle de Comte-Sponville.
La douleur est un fait, et ne veut rien dire : la Muse de Musset peut rentrer chez elle – Circulez, y a rien à voir. Nul sens, nulles valeurs, nul rachat. Vous qui souffrez, prenez de la morphine, vous n’aurez rien à y perdre sauf la souffrance justement.
On remarquera que cette attitude n’a été intégrée dans nos mentalités que récemment, et que ce ne sont pas les médecins qui l’ont poussée en avant : curieusement les centres antidouleur ont été longtemps ignorés dans nos hôpitaux, où la tendance était plutôt à l’indifférence vis-à-vis des tourments de la maladie. Bien entendu les religieux qui font de la douleur (et pas seulement celles de l’enfantement) l’occasion d’un rachat y ont vu une entreprise nocive, pour ne pas dire impie.
On aurait peut-être gagné du temps à être attentifs à la pensée épicurienne qui fait de la douleur un mal et du plaisir un bien. Quel mal peut-il y avoir à s’épargner le mal ?
On dira que du temps d’Epicure on n’avait pas le choix, et que les analgésiques ont mis plus de 20 siècles à apparaitre.
C’est oublier que la douleur est d’autant plus douloureuse qu’elle s’accompagne du stress : et c’est justement là-dessus que porte le remède (2) épicurien : ne t’angoisse pas de la souffrance, même si elle est intense, elle ne durera pas (sous-entendu : dans le pire des cas, elle te fera mourir avant peu).
Le stress, nul besoin d’anxiolytique pour s’en défaire : un peu de philosophie (épicurienne) suffit.
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(1) Voici le texte complet : « D'abord, ne pas interpréter, ni justifier. La douleur est un fait, et ne veut rien dire. Elle n'a pas de sens, pas de valeur, pas d'excuses. Même atroce, elle est insignifiante (et cela est le plus atroce peut-être, qu'elle ne signifie rien) ; même légère, elle est insensée. Quoi de plus bête qu'une rage de dents ? Le réel se reconnaît là, qui se contente d'exister. "Pourquoi ?", demande-t-on devant celui qui souffre. Mais il n'y a pas de réponse (on souffre toujours pour rien), ni même, en vérité, de question. Le corps hurle, mais n'interroge pas. On parle pourtant des leçons de la douleur, et chacun, qui l'a vécue, y reconnaît quelque chose de son expérience. Mais ces leçons sont toutes négatives, ou critiques : la douleur n'apprend rien, qu'en annulant ce qu'on croyait savoir. Sa leçon est une anti-leçon : tout discours doit cesser, devant elle, qui parait ridicule, insupportable ou lâche. Non pas tout discours, pourtant. Et cela fait un sacré tri. Combien de livres supportent la proximité immédiate de l'horreur ? » André Comte-Sponville
(2) La doctrine d'Épicure peut être résumée par ce que les épicuriens ont appelé le tetrapharmakon (quadruple-remède), formulé ainsi :
1 - on ne doit pas craindre les dieux ;
2 - on ne doit pas craindre la mort ;
3 - le bien est facile à atteindre ;
4 - on peut supprimer la douleur.

Citation du 11 janvier 2012

Sartre, Suarez, Karleil, Alain
Lorsque l'humanité sera enfin sage, Nous passerons de la compétition, Dans l'individualisme à l'individualité, Dans la coopération.
Colette Magny – Co-opération – Chanson
Mes abeilles couvrent deux mille cinq cent kilomètres carrés de terres dont je ne suis pas propriétaire, à la recherche de leur pitance, butinant de fleur en fleur pour lesquelles je ne paye aucune location, volant le nectar, mais en retour pollinisant les plantes. C’est une forme d’agriculture anarchique et paisible…
Sue Hubbelle- Une année à la campagne
Je dois aux Grigris de Sophie ce texte et l’idée qui va avec. Qu’ils en soient remerciés (1).
Passons sur l’originalité qui consiste à faire des abeilles non un exemple d’activité féconde, pas plus que d’organisation sociale, mais bien plutôt d’anarchie.
Oui, ça c’est vraiment original, parce qu’au fond de tout ça, il y a l’idée qu’en oubliant le principe de la propriété privée on peut parfaitement prospérer, que l’on n’est ni dans l’affrontement de la rapine, pas plus que dans l’échange, mais dans la complémentarité des besoins individuels, puisque – faut-il le dire ? – c’est en satisfaisant leurs besoins que les abeilles fécondent les fleurs aux quelles elles dérobent leur nectar. (2)
Pas d’échange… Belle idée, sauf qu’on oublie un peu que le nectar ne sert qu’à attirer l’abeille, qu’il n’intervient en rien dans la reproduction de la plante, et que s’il existe, c’est que la nature a anticipé l’échange avec l’insecte fécondateur : tu me pollinises et en échange je te donne mon nectar - qui n’existe que pour ça.
Même chose avec la reproduction chez les humains : il faut bien que la nature nous ait donné des organes à la fois reproducteurs (pour l’espèce) et jouisseurs (pour les individus), sans quoi ça ne marcherait pas. (3)
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(1) Voici le texte entier : « Mes abeilles couvrent deux mille cinq cent kilomètres carrés de terres dont je ne suis pas propriétaire, à la recherche de leur pitance, butinant de fleur en fleur pour lesquelles je ne paye aucune location, volant le nectar, mais en retour pollinisant les plantes. C’est une forme d’agriculture anarchique et paisible, et de gagner ainsi sa vie exerce sur moi un tel attrait par son côté sauvage, erratique, maraudeur qu’il me rend inapte à toute autre méthode, sauf peut-être le cambriolage des banques. » Sue Hubbelle- Une année à la campagne
(2) Il est vrai qu’on trouverait une idée assez proche chez Mandeville
(3) Ceux qui se sont posé la question : « Pourquoi les femmes ont-elles un clitoris ? » trouveront du même coup la réponse.

Monday, January 09, 2012

Citation du 10 janvier 2012

…il est également vrai de dire que, toutes choses égales, ceux qui savent manger, sont comparativement de dix ans plus jeunes que ceux à qui cette science est étrangère. Les peintres et les sculpteurs sont bien pénétrés de cette vérité, car jamais ils ne représentent ceux qui font abstinence par choix ou par devoir, comme les avares et les anachorètes, sans leur donner la pâleur de la maladie, la maigreur de la misère et les rides de la décrépitude.
Brillat-Savarin – Physiologie du goût, 1825, p. 146.
Il y a peu (5/1/2012), nous désespérions les amateurs de bonne chair en leur suggérant que peut-être ça les allait les priver d’ardeur sexuelle.
Aujourd’hui, donnons la parole à la défense de la bonne chair – Brillat-Savarin (LA référence en matière de gastronomie) : l’abstinence est mauvaise pour la santé ; en particulier pour ceux qui suivent une règle impliquant des privations alimentaires.
Donc, si bien manger mène à la santé, alors ne doutons pas que ceux qui ont, grâce à ça, du bon sang rouge dans les veines, ne crachent pas sur la bagatelle.
--> Les peintres dit Brillat-Savarin représentent ceux qui font abstinence, comme les avares et les anachorètes, avec la pâleur de la maladie, la maigreur de la misère et les rides de la décrépitude. Brrr…
Vérifions :


Millet – La tentation de Saint Antoine.
Alors, c’est vrai : la Tentatrice est apparemment en meilleure santé que le Saint, qu’on prendrait facilement pour un moribond. D’ailleurs, je ne peux reproduire ici les tableaux illustrant cette Tentation, parce qu’ils sont trop nombreux, mais généralement Saint Antoine est représenté comme un vieillard dont on n’imagine pas qu’il puisse avoir de pareils fantasmes. Dans le cas de Saint Antoine, le miracle, ce n’est pas de résister à la tentation, c’est d’en être le siège.
Revenons à l’abstinence entendue comme refus de tout plaisir du corps. Pourquoi se priver de quelque chose qui apporte du plaisir ? Réponse : pour accéder à une plus grande moralité, où au salut de l’âme (1).
C’est donc un choix, qui suppose qu’à un moment on ait pris la balance et qu’on ait mis dans un plateau le tournedos Rossini (2), et dans l’autre, non pas une partie de pattes en l’air, mais le salut de son âme. Y pas photo, n’est-ce pas ?
Oui, mais ; si maintenant il s’agit de mettre dans un plateau la partie de patte en l’air et dans l’autre le salut de l’âme : si vous vous appelez Don Juan, vous savez déjà de quel côté la balance va pencher.
Ce qui prouve la supériorité du bas-ventre par rapport au le ventre.
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(1) Abstinence – Dans le domaine de la mor. ou de la relig. Action ou disposition permanente de la volonté consistant à se priver de certains biens ou plaisirs dans une intention de perfection mor. ou spirituelle. (TLF)
(2) Ici encore, voir post du 5 janvier

Sunday, January 08, 2012

Citation du 9 janvier 2012

Heureux qui, comme Ulysse, a fait un beau voyage / Ou comme cestuy-là qui conquit la toison, / Et puis est retourné, plein d'usage et raison, / Vivre entre ses parents le reste de son âge !
Joachim Du Bellay (1522-1560)
- Heureux qui comme Ulysse...

Jack Lang candidat aux législatives dans les Vosges ?
Selon plusieurs sources proches du PS, l'actuel député du Pas-de-Calais sera candidat socialiste à Saint-Dié, dans la deuxième circonscription des Vosges, un département où il est né voilà 72 ans. (Info de la presse en ligne)
Il y a quelque chose d’émouvant dans les pérégrinations de Jack Lang, à la recherche d’une circonscription de parachutage : personne ne souhaite voir l’éléphant socialiste prendre comme aire d’atterrissage une circonscription confortablement occupée par d’autres. On imagine la déception du brillant politicien, qui sait occuper tous les plateaux de télévision sans faire montre d’arrogance et néanmoins avec tout le brillant qu’on attend d’un héros français, lorsqu’il voit le peu de cas qu’on fait de son mérite.
Toutefois, avec Saint-Dié, voilà que la solution se dessine : sa légitimité ne saurait être contestée s’il s’agit de devenir le représentant de la circonscription où il vit le jour. Et cela, parce qu’il est naturel de revenir finir sa vie là où on l’a commencée, ou plutôt : de vivre entre ses parents le reste de son âge.
En sorte que, refuser à Jack Lang de se présenter à Saint-Dié, ce n’est pas seulement lui refuser de bénéficier de la sinécure de cette circonscription des Vosges ; c’est encore lui dire :
- Qui tu es, toi ? Passe ton chemin, on ne te connaît pas ici. Personne ne se présente pour dire de toi : oui, je suis son parent et je lui ouvre ma maison.
Avouez que c’est vraiment trop cruel.

Saturday, January 07, 2012

Citation du 8 janvier 2012

Après avoir fait une grosse connerie, le chat grimpe dans l’arbre. Et le fonctionnaire, dans la hiérarchie.
Bruno Masure – Le Petit Livre de Bruno Masure
C’est ma façon d’auto-célébrer l’anniversaire de ce blog, débuté il y 6 ans, le 8 janvier 2006, et qui compte aujourd’hui 2200 citations…

Car, voici ma première citation, celle par laquelle je débutais mon Blog, il y a 6 ans :
« Citation du 8 janvier 2006
Les fonctionnaires sont comme les livres d'une bibliothèque: les plus haut placés sont ceux qui servent le moins. »
Alphonse Karr, 1808-1890, journaliste et écrivain français
C’est en effet la même idée, celle que la promotion peut servir à se débarrasser d’un collaborateur incompétent (à rapprocher du Principe de Peter, évoqué dans le même Post).
Je profite de la situation (= prétexte à parler de soi en faisant mine de parler d’autre chose), pour dire combien la forme du Blog est avantageuse à qui ne veut pas (trop) s’engager en écrivant. Car un blog, n’est-ce pas, n’a ni début ni fin – du moins pas au sens où une œuvre doit en avoir. Si demain j’arrête ma publication et que je laisse en plan ce blog (1), il sera achevé – pas inachevé.
De plus – merveille de la technique – le format déroulant assure que chaque jour voit apparaitre un nouveau texte et – surtout – disparaitre le précédent. Une grosse bêtise ? Une incongruité ? Plouf ! A la trappe ! Quel confort !
Sans rire, je fais partie de ceux qui, en écrivant, aiment non pas ce qu’ils ont écrit, mais ce qu’ils vont écrire. Donc le Blog, qui est le mode de publication au jour le jour, est une excellente formule.
Voilà pourquoi se souhaiter à soi-même un bon anniversaire – anniversaire qui regarde le passé plus que l’avenir – c’est peut-être une bêtise de plus… Mais revenez demain : ça aura disparu
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(1) Comme je l’ai fait pour mon autre Blog « Docteur philo » ; mais là c’est du fait de mes lecteurs qui ne me posent plus aucune question : il faut croire que j’ai répondu à toutes leurs curiosités (les malveillants pourront supposer que c’est à cause de la faiblesse des réponses…)

Friday, January 06, 2012

Citation du 7 janvier 2012

Eh bien ! vieux lubrique, vieux Valmont, vieux Cardoville, infect Noirceul et père Jérôme, souilles-tu suffisamment le département de la Haute-Garonne ? Emplis-tu les ravines des éjaculations de ton indomptable broquette ? Combien de chèvres as-tu déshonorées, combien de caméristes séduites, de pâtres violés et de tables d’hôte éblouies ? (…) Terrifies-tu les bourgeois ? Soutiens-tu un peu les principes ?
Gustave Flaubert, lettre – lundi 18 juillet 1859, à Ernest Feydeau (1)
Sade : le plaisir de la lecture vient évidemment de certaines ruptures [...] des messages pornographiques viennent se mouler dans des phrases si pures qu’on les prendrait pour des exemples de grammaire. [...] Le plaisir du texte est semblable à cet instant intenable, impossible, purement romanesque, que le libertin goûte au terme d’une machination hardie, faisant couper la corde qui le pend, au moment où il jouit.
Roland Barthes, Le Plaisir du texte
Vieux Valmont, vieux Cardoville, infect Noirceul et père Jérôme… Comme si ces références à la littérature de l’Enfer de la B.N. (2) ne suffisaient pas, le niveau de langage et la structure des phrases de Flaubert sont là pour produire l’effet signalé par Barthes, c’est-à-dire ces ruptures qui provoquent la commotion nécessaire à la jouissance.
Je crois que l’intérêt du petit texte de Barthes est de souligner que le lecteur prend son plaisir dans un effet travaillé par l’auteur dans son texte – auteur qui ne doit pas se contenter d’aligner des propos pornographiques. Car à ce compte, l’écart entre la littérature et le roman de gare serait comblé.
De quelle rupture parle-t-on ? De la rupture venant d’une cohabitation du pur et de l’impur. Ici : « des messages pornographiques viennent se mouler dans des phrases si pures qu’on les prendrait pour des exemples de grammaire » – et ce n’est évidemment qu’un exemple.
Voyez donc ce passage de la Lettre de Flaubert : Emplis-tu les ravines des éjaculations de ton indomptable broquette ? Comment mieux analyser l’effet de cette phrase qu’en soulignant l’écart entre le fonds (sic) et la forme ? Et bien sûr, la pornographie n’est qu’un exemple de jouissance éprouvée dans la lecture du texte.
C’est que toute pornographie n’est pas jouissive (pornographie du roman de kiosque de gare), et toute jouissance littéraire ne nécessite pas forcément la pornographie. Mais il faut avouer que cette dernière est plus facile à mettre en œuvre selon les principes énoncés par Roland Barthes.
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(1) Ne pas confondre Ernest Feydeau avec Georges Feydeau, son fils (fils « présumé » : voir les ragots de l’époque ici)
On retrouvera ce texte de Flaubert – et bien d’autres – dans cet article joliment titré « La prostate de Flaubert »
(2) l'Enfer, dans le monde des bibliophiles, est une cote, apparue en 1844 pour rassembler tous les ouvrages licencieux sous une même appellation.

Thursday, January 05, 2012

Citation du 6 janvier 2012

Deux précautions valent mieux qu'une.
Proverbe
Principe de précaution : « En cas de risque de dommages graves ou irréversibles, l'absence de certitude scientifique absolue ne doit pas servir de prétexte pour remettre à plus tard l'adoption de mesures effectives visant à prévenir la dégradation de l'environnement. »
Déclaration de Rio (1992)
Heureusement qu’il y a des colloques internationaux pour nous expliquer les proverbes qui forment notre fonds ancestral de sagesse ; sans quoi on n’y comprend rien.
Car, en effet, pourquoi faudrait-il deux précautions plutôt qu’une ? Si la précaution est bonne, une seule devrait suffire. Si elle est mauvaise, laissons-la de côté.
Mais voilà : en matière de précaution, on n’est sûr de rien. Ou plutôt on est sûr que la probabilité d’avoir un inconvénient ou un accident n’est pas nulle. (1) D’où le fameux principe de précaution qui comme on le sait concerne bien autre chose que le seul environnement, tels les téléphone portables et les antennes relai ; les OGM ; et bien sûr les centrales nucléaires.
Reste que, puisque la précaution concerne des risques qui ne sont que statistiques, on ne sait pas vraiment à partir de quelle fréquence il faut déclencher le fameux principe. Faut-il renoncer au portable, ou bien seulement empêcher nos enfants de l’utiliser ? Et le maïs génétiquement modifié ? Sa présence dans les champs est-elle un risque à empêcher ? Ou bien seulement dans notre assiette ? Et du temps de la vache folle, vous avez boycotté la viande rouge ?
Bref : mon idée est qu’on est un peu hypocrite avec tout ça. L’application draconienne d’un tel principe empêcherait toute modernité, et nous reverrait à la diligence et au pigeon voyageur.
Oui, mais alors : comment dire où passe la limite entre précaution raisonnable et précaution déraisonnable ?
--> La réponse dépend de l’intérêt pour ce dont nous serions privés par une telle application : que le maïs transgénique soit interdit : bravo ! Mais que les téléphones portables deviennent muets parce qu’on a supprimé les antennes relai (ou réduit la portée de leurs émission) : là, ça ne va plus du tout.
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(1) Voir ici la distinction entre prudence, prévention et précaution.

Wednesday, January 04, 2012

Citation du 5 janvier 2012

La vitalité sexuelle dépend de l'hygiène alimentaire. La cuisine française, du moins lorsqu'on en abuse, est le meilleur moyen de se désexualiser. Sexualité égale frugalité.
Roger Peyrefitte – Propos secrets
Allez… J’en remets une couche : après la diatribe contre les excès du réveillon voici le propos de Peyrefitte montrant qu’on ne peut abuser de tout en même temps et que les plaisirs de la table vont à l’encontre de ceux du lit.
Sexualité égale frugalité : comment ça marche ?
- D’abord, laissons de côté les vieillards grincheux qui ont réveillonné avec une tranche de jambon et une tisane, et puis qui, une fois sous la couette, ne se sont pas sentis plus vigoureux que d’habitude. C’est que leur poireau n’a plus la queue verte – et voilà tout (1)
- Soulignons maintenant que la sexualité est – pour le corps – un effort. J’avais un coiffeur (les dames savent combien leur coiffeur est une source d’information et de conseils ; qu’elles sachent qu’il en va de même chez les messieurs) – mon coiffeur, donc, me disait qu’un coït, ça équivalait à 4 kilomètres de course à pied (compte tenu de sa corpulence, c’est un exercice qu’il ne devait pas réaliser tous les jours). Notre corps, il faut donc certes le nourrir : car même si ça n’équivaut pas à un marathon (quoique…), on ne peut pas sans dommage diviser ses forces, les une occupées à digérer un lourd repas, les autres à … comment dire ? besogner les dames – oui, c’est ça. La division des tâches, ça peut se faire, mais c’est toujours au détriment de l’efficacité ; on le voit tous les jours avec nos ordinateurs.
- Peut-être n’allons-nous pas encore au cœur du propos de Roger Peyrefitte. Car il parle de « désexualisation » terme très fort qu’emploient les freudiens, pour signifier que l’énergie libidinale est détournée de son but pour trouver à se satisfaire sans qu’on n’en reconnaisse la jouissance. Ce qui fait que si je mange un tournedos Rossini, mon plaisir est sans rapport avec un orgasme, mais que malgré tout ma libido se décharge sans que je ne m’en aperçoive – et que du coup elle perde de son intensité.
Heureux les pauvres et les affamés, car ils peuvent encore… (Lire la suite ici).
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(1) Uniquement pour ceux qui ne comprennent pas l’allusion, voir le Post consacré au maréchal de Bassompierre – L’homme qui se prenait pour un poireau.

Tuesday, January 03, 2012

Citation du 4 janvier 2012

La violence animale naît de l'altération des lois de la nature, alors que la violence humaine naît de leur transgression dans la parole et la civilité.
Boris Cyrulnik – Les Nourritures affectives
Je suis, sans doute comme vous, un peu interloqué par cette conception de la violence animale qui en fait un phénomène transgressif – en tout cas anormal. Sans doute Cyrulnik ne considère-t-il pas la mise à mort de la proie par le prédateur comme une violence tant que la faim – ou la survie de la nichée – en est la cause. (1)
En revanche, je suis d’avantage en accord avec lui lorsqu’il fait de la parole et de la civilité une voie d’accès à la violence. Non pas que la batte de baseball ou le coup-de-poing américain ne soient pas des instruments très évidents de la violence humaine. Mais cette violence là, on peut s’en protéger en évitant les mauvais quartiers ou les rues sombres. En revanche, qui donc nous protégera des langues de vipère et des propos fielleux ?
Mais le comble de la perversité dans ce genre de violence est bien dans un détournement de la civilité dont nous parle Cyrulnik. Car la civilité est faite pour attirer d’abord, pour sécuriser en suite les relations humaines, bref pour rapprocher les hommes. Et c’est là, dans cette proximité qu’elle va agir et porter le coup qui blesse.
On connaît l’art insurpassable des chinois pour infliger les pires tortures avec toutes les amabilités qu’on peut imaginer. Il ne faudrait pourtant pas croire qu’on n’en participe pas nous-mêmes. J’ai entendu un de nos vieux politiciens qui avait pris part à la résistance et avait été torturé par la milice de Vichy, raconter qu’au moment de lui infliger le supplice de la baignoire, son tortionnaire lui avait indiqué une chaise sur la quelle il pouvait déposer ses vêtements – sans doute pour éviter qu’ils ne se mouillent ou ne se froissent.
Au sein de la violence, la civilité est elle-même une violence.
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(1) Comme exemple de la violence animale selon les principes de Cyrulnik, je pense au massacre des brebis perpétré par les loups dans les pacages de nos montagnes. Au lieu de tuer une brebis et de la dévorer, le loup (il peut être seul) tue toutes les brebis et les laisse sur le terrain sans les manger. Il ne tue pas par faim, et on dirait que le nombre des proies détraque son instinct de chasseur. Du moins, c’est comme ça que les spécialistes du loup analysent la chose.

Monday, January 02, 2012

Citation du 3 janvier 2012

L'homme à convictions n'est pas l'homme de la pensée scientifique ; […] à l'âge de l'innocence théorique il est un enfant, quelle que soit sa taille.

Friedrich Nietzsche – Humain, trop humain.

Ça y est ? Vous avez commencé à appliquer les bonnes résolutions prises le 1er janvier ? Vous ne mangez plus entre les repas, et vous arrêtez d’envoyer des Tweets idiots à tout le monde ?

… Je sens sur moi des regards lourds de reproches : Qui tu es, toi, pour ironiser méchamment ? Et toi-même, quelles sont tes bonnes résolutions, qu’on voie comment tu les tiens ?

--> Bon. Si vous voulez savoir, moi je veux arrêter de donner des citations mutilées qui empêchent la pensée de se prendre son envol.

Exemple : soit la citation ci-dessus

1 – Au lieu de la découper ainsi, il faudrait prendre le texte entier :

Une conviction est la croyance d'être, sur un point quelconque de la connaissance, en possession de la vérité absolue. Cette croyance suppose donc qu'il y a des vérités absolues ; en même temps, que l'on a trouvé les méthodes parfaites pour y parvenir ; enfin que tout homme qui a des convictions applique ces méthodes parfaites. Ces trois conditions montrent tout de suite que l'homme à convictions n'est pas l'homme de la pensée scientifique ; il est devant nous à l'âge de l'innocence théorique, il est un enfant, quelle que soit sa taille. Mais des siècles entiers ont vécu dans ces idées naïves, et c'est d'eux qu'ont jailli les plus puissantes sources de force de l'humanité.

2 – En suite, détailler les trois erreurs de l’homme de conviction.

3 – Et puis montrer que la pensée de Nietzsche est une pensée qui prend tout le monde à contrepied : les erreurs de l’homme des convictions sont bénéfiques car, sans elles, l’humanité eut stagné dans son marasme. Pas de progrès sans erreurs répétées.

--> Stop ! Mon indicateur de fréquentation me dit que depuis le paragraphe N°2 plus personne ne lit mon Post.

Décidément : y a-t-il quelque chose de plus bête que prendre de bonnes résolutions le 1er janvier ? Les tenir.