Tuesday, May 31, 2011

Citation du 1er juin 2011


La pile Wonder ne s’use que si on s’en sert !

Slogan publicitaire (1)

On ne s'use que si on sert, bien qu'on sache que ceux qui ne servent à rien s'usent beaucoup !

François Mitterrand Conférence de presse - 11 Septembre 1991

Laissons tomber le « spécial-nostalgie » à l’égard des réclames d’autre fois, et regardons d’un peu plus près ce que Mitterrand fait du slogan des piles Wonder.

Qu’est-ce donc qui s’use par l’inactivité ?

- Déjà, on peut penser aux effets de la « placardisation » de certains fonctionnaires – à moins que Mitterrand n’ait pensé à la traversée du désert connue par certains hommes politiques. Tous ces gens qui n’existent que par leur fonction – entendons : par leur fonctionnement – cessent progressivement de bénéficier de l’aura que leur apporte leur pouvoir de décision. L’exemple saignant du moment, c’est la chute de DSK, non que l’homme soit mort – heureusement – mais parce que le pouvoir qui était le sien le faisait exister, et que maintenant (et pour le moment du moins) il n’est plus qu’un citoyen comme un autre. Disons qu’il s’est usé d’un seul coup alors que d’autres s’usent en un ou deux ans.

- Mais ne pourrait-on pas en dire autant de l’homme en général ? De notre corps, de notre cerveau, de nos capacités et même de nos relations sociales ?

Et tiens, pourquoi fait-on des mots croisés, pourquoi du Scrabble avec des amis, pourquoi la partie de domino sur le guéridon du bistrot ? Tout ça aussi c’est du « fonctionnement » – pour ne pas s’user trop vite.

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(1) Les piles Wonder se vantaient d’être insensibles à l’humidité qui faisait se décharger spontanément toutes les autres piles.

Monday, May 30, 2011

Citation du 31 mai 2011

Le clou qui dépasse appelle le marteau.

Proverbe japonais

Le clou qui dépasse appelle le marteau – Je traduis :

- C’est la rébellion qui entraîne la répression, et non l’inverse.

- L’individualité qui sort du rang est comme le clou qui dépasse : un désordre.

- La beauté est dans l’ordre et non dans le désordre.

- Donc : le marteau est l’instrument de l’ordre – et de la beauté.

Quant à la forme, on ne peut qu’admirer la concision du proverbe japonais : décidément les inventeurs des Haïkus sont des maitres dans l’art de dire beaucoup avec peu de mots. On devrait inviter des communicants japonais pour la prochaine campagne électorale : ça nous gagnerait du temps.

Quant au fond, on peut être sceptique : le conformisme institutionnalisé est-il une bonne chose ?

On va sans doute le savoir bientôt en observant non les japonais, mais les chinois. On nous dit que les chinois sont des bucheurs sans égal, que chez eux, ceux qui ne le sont pas meurent de faim, et que les autres sont prêts à nous dévorer tout crus parce qu’ils sont habitués à travailler 18 heures par jour avec 8 jours de vacances dans l’année.

Et pourquoi ce travail acharné ? Parce qu’il s’agit pour eux non d’inventer, mais de reproduire : il faut tout connaitre par cœur pour ne pas se tromper en refaisant. Et ça c’est du boulot.

Soit. Mais que valent-ils dès qu’il faut inventer, modifier, créer ? Que ce soit dans l’organisation de l’entreprise, dans les process de fabrication, dans l’innovation industrielle, il y a toujours un moment où le respect de la hiérarchie est un frein plus qu’un accélérateur, des moments où – comme on dit – il faut « renverser la table ».

Je crains fort que le chinois qui aura envie de renverser la table ne reçoive un bon coup de marteau.

Et même de marteau piqueur.

Sunday, May 29, 2011

Citation du 30 mai 2011

Un mari idéal est celui qui ne boit pas, sait faire la cuisine, le lavage et le repassage et de plus est célibataire !

Anonyme

Passons sur le paradoxe qui anime cette phrase : trouver un homme qui soit un mari et en même temps un célibataire ? C’est possible, ça ? – Oui, à condition de décaler dans le temps : le mari idéal est idéal parce que disponible pour la femme qui le convoite. Célibataire, mais pas pour longtemps.

Qui est donc ce mari idéal ? Quelqu’un qui fait le ménage, la cuisine, le lavage et le repassage : en bref, c’est un domestique, capable de décharger la maitresse de maison de toutes ces tâches, afin que la housewife ne soit plus desperate.

Bien entendu on conclura que notre Anonyme est une femme, qui sans doute n’a pas voulu révéler son identité de peur d’être taxée de sexisme.

Mais si l’on poursuit un peu la réflexion, on se dira aussi qu’on est en face d’un sketch de psychodrame lorsque les patients se mettent à jouer le rôle de leur partenaire – et réciproquement. Plutôt que de demander aux hommes de dire ce qu’ils savent de leurs épouses, demandons-leur à elles comment elles voient le mari idéal : c’est comme ça qu’on saura qui elles sont.

Venons-en maintenant à l’essentiel : messieurs comptez-vous devenir l’homme idéal de notre citation ? Brrr…

Et nous, comment voyons-nous la femme idéale ? En supporter du PSG, affalée sur le canapé devant la télé buvant de la Kro et éructant des insultes contre l’arbitre ?

Si c’est le cas, moi je vous le dit tout net : nous n’avons pas les mêmes valeurs !

Moi, je vois la femme idéale comme manager d’entreprise (1) - ou peut-être directrice du FMI - mais qui en plus serait également exploratrice en Amazonie et championne de saut à l’élastique.

Si vous avez le bon profil, écrivez-moi.

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(1) La femme idéale ? « Atomic » Anne (Lauvergeon).

Saturday, May 28, 2011

Citation du 29 mai 2011

Dans les souvenirs d'enfance de chaque bon cuisinier se trouve une grande cuisine, une cuisinière en marche, un gâteau qui cuit et une maman.

Barbara Costikyan – Holiday Entertaining - Octobre 1984

Dites-moi, êtes-vous un bon(ne) cuisinier(e) ? Si tel est le cas, pourriez-vous me dire qu’est-ce qui vous a poussé vers la cuisine ?

- La faim

- La gourmandise

- Le désir de plaire à vos convives

- Le souvenir de votre maman

Un gâteau qui cuit et une maman… C’est cela, n’est-ce pas ? Fermez les yeux et revoyez l’image de votre maman quand vous étiez petit(e).

Ça se passe dans la cuisine, vous êtes tout petit, debout sur la chaise entrain de touiller la pâte à crêpe ; et votre maman est à coté de vous, assurant d’une main votre équilibre et remuant de l’autre de la crème – au chocolat, la crème ? Oui, bien sûr.

Etes-vous pour autant devenu un bon cuisinier ?

Hum… Consolez-vous, car notre citation ne dit pas que tous ceux qui ont gardé un tel souvenir soient devenus des cuisiniers hors pair, mais simplement que tout bon cuisinier à ce souvenir.

Pourquoi pas ? Mais j’avoue que je ne suis pas convaincu. Car dans ce cas l’amour de la bonne cuisine viendrait de la petite enfance, et elle nous inviterait à une bonne vieille régression infantile – mieux même : cuisiner ne serait autre chose qu’une tentative pour ressusciter les couleurs, les saveurs, les odeurs, qui depuis notre enfance, ont toujours constitué l’environnement du bonheur. Ne surtout pas innover, mais reproduire.

Je suspecte les grands chefs qui mettent leurs grands chapeaux et partent dans la montagne cueillir les herbes aromatiques que leurs grand-père leur avait montrées pour faire les bonnes sauces et les bons ragouts, de nous bluffer. Car si c’était le cas, plus d’invention en cuisine. Tout ce qu’on pourrait faire, c’est ressusciter la cuisine d’autre fois, celle de nos mère, ou celle de nos grands-mères.

Finie la chaudrée de palourdes de la Nouvelle-Angleterre.

Renoncez aussi aux queues de crevettes justes passées à la poêle et parfumées au jus cuisinés de chez Monin

Friday, May 27, 2011

Citation du 28 mai 2011

[Théodore de] Bèze et sa magnifique comparaison de l'Eglise avec une enclume, qui n'était faite que pour recevoir des coups et non pas pour en donner, mais qui aussi, en les recevant, brisait souvent les marteaux dont elle était frappée.

Bossuet Vème avertissement

Ce n’est pas le marteau qui brisera l’enclume, mais l’enclume qui brisera le marteau : le paradoxe est bien fait pour retenir l’attention. L’extraordinaire popularité des martyrs chrétiens, comme par exemple sainte Blandine, confirme bien les propose de Bossuet.

On voit ici les lions chargés de dévorer la sainte se soumettre à ses pieds. Mais l’histoire ne s’arrête pas là : Blandine abominablement torturée pour la plus grande joie du public, exhorte les chrétiens à subir le même sort pour montrer à tous combien est forte leur foi en Dieu.

Et aujourd’hui, dirions-nous également que l’enclume brise le marteau ? Y a-t-il donc encore des martyrs ? Sans doute. Sauf que maintenant on se moque un peu de savoir pourquoi on a subi le martyr : tout ce qui compte c’est de se présenter comme martyr.

C’est cela qu’il aurait fallu rappeler à notre DSK lorsqu’il apparait triste et mal rasé, menotté entre deux policiers. (1)

Qu’on se rappelle les menottes de José Bové : lui, il a su construire sa popularité là-dessus.

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(1) Juste une remarque : on a dit que les français avaient été sidérés d'apprendre que Dominique Strauss-Kahn avait été arrêté pour viol, imaginant peut-être que les politiques ne sont pas adeptes de ce genre de chose.

C'est qu'ils n'ont pas lu nos philosophes: comme Alain - ou a défaut de lire Alain qu'ils lisent notre estimé Blog.