Sunday, May 20, 2007

Citation du 21 mai 2007

Le sport, activité noble qui, à l'instar ... de la cuisine au bain-marie ..., permet à l'humain de dépasser son animalité.

Jean Dion - Dans Le Devoir (journal québécois). (1)

Cuisiner, c’est dépasser son animalité : même les cannibales sont de fins cuisiniers (pour vous en convaincre, lisez Pierre Clastres, Chronique des Indiens Guayakis : il y a plein de recettes pour accommoder des restes humains). C’est donc un acte culturel par excellence.

C’est ce que Lévi-Strauss a montré avec son célèbre triangle culinaire




Chacun des sommets du triangle représente l’une des façons de transformer de la matière vivante en nourriture (les viandes entre autre). Certaines transformations sont certes plus proches de la nature que des élaborations « culturelles » :

- le cuit-fumé est plus proche de la nature comme mode d’élaboration (parce qu’entre le feu et la viande il n’y a que l’air (=la fumée)) que le « cuit-bouilli » qui requiert en plus des ustensiles (récipients) et un médium (l’eau).

- Mais en revanche, le résultat du premier est plus culturel que le second : le boucané se conserve plus longtemps qu’à l’état naturel ; le bouilli par contre ne se conserve guère.

J’ajouterai que si le pourri nous paraît incompatible avec la consommation, c’est que nous avons oublié que, traditionnellement, il se retrouvait articulé avec d’autres modes de préparation culinaire (cas du faisandage ; nous parlons aujourd’hui plus joliment de viandes « rassies »).

Au fond ce qui est utile, ce n’est pas de remplacer son livre de cuisine par un traité d’anthropologie (même structurale). C’est de prendre conscience que rien dans ce que fait l’homme n’est strictement naturel. Et tout acte de culture peut s’analyser en terme d’opposition (cru/cuit ; salé/sucré)… Et que ces oppositions ne sont pas naturelles mais qu’elles dépendent du système dans le quel elles figurent (exemple justement du sucré et du salé, qui ne s’opposent pas dans toutes les cuisines).

A méditer à l’heure où le métissage des cuisines est plutôt à la mode…
…mais le ministère de l’identité nationale va y mettre bon ordre, je sens ça.

(1) Qui c’est ce Jean Dion ? Le père de Céline ? Tout ce que j’ai trouvé, c’est ça : Conseiller en communication québécois (1949- ) auteurs de nouvelles.

7 comments:

Anonymous said...

"C’est de prendre conscience que rien dans ce que fait l’homme n’est strictement naturel."

Ou que tout ce que fait l'homme est naturel, le corollaire me semble juste aussi.

Sinon trés cher JP, êtes vous en phase de régime ? La nouriture semble vous obscéder ces derniers temps :D

(Oui, je suis indélicat ^^)

Jean-Pierre Hamel said...

-êtes vous en phase de régime ?
Eh bien non, ce n'est même pas ça. De fait il m'arrive de ne pas épuiser mon propos en une fois compte tenu des limites que je m'impose. Le régime, de fait, il porte sur l'étendue de mes eveloppements.
- Ou que tout ce que fait l'homme est naturel : admettons. Ce qui compte, c'est de prendre acte de la ligne de démarcation qui sépare ces deux domaines, et qui est de l'ordre du symbolique.

Djabx said...

Bonsoir,

En cherchant un peu sur Jean Dion, j'ai trouvé ceci. Ce qui semble correspondre avec l'auteur de votre citation.

Il semble écrire dans le journal "Le Devoir" et vous devriez pouvoir trouver ses mots ici.
Manifestement vous pouvez même lui envoyer un email si vous voulez en savoir encore plus sur lui.

Jean-Pierre Hamel said...

Merci pour l'info à propos de Jean Dion. J'ai jeté un coup d'oeil sur ses chroniques - bien qu'elles soient tronquées (la suite est réservée aux abonnés) elles ne manquent pas de saveur. Ainsi celle-ci, qui commence ainsi :
"Réagissant à une nouvelle-choc dans le domaine de la prospective, un gars s'est dit d'accord avec l'assertion voulant que les gens ne travaillent pas assez..."
Nous aussi on a un gars qui trouve qu'on ne travaille pas assez : s'ils en veulent au Québec...

Mylagan said...

Dépasser son animalité...Est-ce que tout ce qui est animal est "mal" ? Ne dit-on pas qu'il y a plus de vitamines dans les légumes crus ? Et qu'il est dommage d'éplucher certains légumes parce que l'on perd ainsi une bonne partie de ces vitamines ? C'est vrai que personnellement je ne mange pas tout, tout cru (en particulier la viande) mais les crudités ne font de mal à personne et il est peut être parfois bon de prendre exemple sur les animaux, d'ailleurs, ceux-ci ne font-ils pas du sport pour "gagner" leur nourriture ? (avis d'une "novice" en philosophie)

Jean-Pierre Hamel said...

Dépasser son animalité...Est-ce que tout ce qui est animal est "mal" ?
Ce n’est pas exactement le problème. On essaie de dire que les hommes ne mangent jamais comme l’animal. Une fois ça admis, il reste à montrer que l’écart entre l’homme et l’animal est ritualisé, c’est à dire qu’on observe des coutumes propres à une zone culturelle.
Vos carottes crues, vous les mangez comment ? Râpées ? En rondelles ? En bâtonnets pour des deeps d’apéritifs ? A moins que vous ne les consommiez en jus vitaminé. Et votre lapin, comment fait-il ?

Mylagan said...

Merci pour votre réponse. Je pense avoir compris.
Je mange le plus souvent mes carottes crues, rapées (et assaisonées) et mon lapin n'aime pas les carottes, il n'aime que les épluchures de pommes, la salade et les feuilles de chou.
C'est sympa de parler un peu cuisine, cela change du sexe et de la politique :)